T’as la ref ? Non, le pantacourt n’est plus un fashion faux pas !
À mi-chemin entre le pantalon et le short, le pantacourt règne sur les podiums et divise les tiktokeurs. On t’explique pourquoi ce vêtement va changer ton summer look.
À mi-chemin entre le pantalon et le short, le pantacourt règne sur les podiums et divise les tiktokeurs. On t’explique pourquoi ce vêtement va changer ton summer look.
Des podiums de Vivienne Westwood à ceux de Chanel, sur Hailey Bieber ou Bella Hadid, le pantacourt effectue un come-back controversé. Assorti à un blazer powerwear et des plateformes de chez Acne Studios, ou à une brassière de yoga en mood That Girl pour Miaou, cet hybride aussi nommé “capri pants” revit à travers de multiples relectures stylistiques. Ma pref ? La version cargo trouvée sur Vinted à porter avec des bottes pointues moulantes et un corset Dior pour revivre la montée des marches de Jenifer aux NRJ Awards 2003 – car be careful et don’t forget que les french pop stars sont des ressources de choc dans les trends Y2K.
Pour être tout à fait honnête, j’ai longtemps essayé d’effacer le pantacourt de ma mémoire. Enterré avec mes tongs compensées et le t-shirt à bordure dentelle siglé Jennyfer, il symbolisait mon entrée dans la préadolescence. Mon inspiration ? Alizée à l’époque de son album Gourmandises pour ses looks sages imaginés pour les shootings de magazines ados, contrastant avec ses espiègles looks de scène. Pudique en couverture de Star Club, la lolita troquait ses shorts moulants dévoilant cuisses et cambrure pour un capri en jean clouté théâtralisant le mollet – et validé par les mamans. La pièce était alors la seule que je pouvais convertir à ma garde-robe et intégrer à mon quotidien d’écolière. Tout en restant une enfant, j’avais l’impression d’être un peu comme ces filles célèbres déliées des contraintes scolaires, qui passent leur vie à chanter. Malheureusement, les années passaient et je ne savais ni danser ni chanter. Mon corps changeait et ce pantalon moulant un brin enfantin ne faisait plus sens. J’étais ado et le modèle de la pop girl espiègle pour les fillettes avait été remplacé par sa version totale trash pour lycéenne – pense à 2007, les sorties de LiLo, Britney et Paris en mini-robe ambiance Girls Gone Wild. Le pantacourt était resté dans mon imaginaire le vêtement de l’éternelle gamine ainsi qu’une pièce de mode que TikTok remet en lumière aujourd’hui.
Car le pantacourt, quoi qu’on en dise, a été au top de la mode. Plus que ça, il fut une alternative powerful pour les femmes occidentales de middle class dans la période post-guerre. Let’s go back in time : dans les 50’s, le répertoire des féminités est limité à la femme au foyer condamnée à faire la vaisselle en robe taille empire. Le pantalon est encore rare, réservé aux femmes artistes et quelques élites dans des circonstances particulières – comme le sport. Pourtant, le vent tourne : avec l’arrivée des congés payés, les femmes des milieux populaires adoptent le jean américain, plus pratique pour bouger. C’est aussi la mode du bronzage, propice à un pantalon plus court permettant d’exposer ses gambettes. Si le short est accusé d’être impudique – interdit sur plusieurs plages de la Côte d’Azur dans les 40’s–, le pantacourt devient un équivalent acceptable. Plus qu’un élément esthétique et pratique, l’historienne Christine Bard le décrit comme synonyme de jeunesse et de décontraction dans son Histoire politique du pantalon (Le Seuil, 2010).
Derrière le succès du pantacourt, on retrouve la styliste Sonja de Lennart, à l’origine du terme capri pants, mais c’est dans une version vichy, sur les jambes de Brigitte Bardot, qu’il se popularise dans les années 1950. Il habillera également Audrey Hepburn dans le film Vacances romaines en 1953 dans un modèle couture dessiné par Hubert de Givenchy, témoignant de l’entrée du capri pants dans le monde des créateurs de mode.
Dans la revue Pièce Détaché (2020), l’historienne Sandrine Tinturier, les actrices en pantacourt et en pantalon incarnent des rôles différenciés. Si le pantalon sert à construire l’image d’une femme “masculinisée” et donc plus dominante, le pantacourt est décrit par l’historienne, comme une pièce permettant de se mouvoir, de jouer les casse-cou mais aussi de flirter éhontément comme une adolescente. Ainsi, le capri est avant tout le symbole de l’invention de l’adolescence féminine au tournant des années 1960.
Entre 1970 et 2000, le pantacourt se fera plus discret. L’uniforme des adolescent.e.s se métamorphose, influencé par la contre-culture hippie aux silhouettes plus larges – le sarouel le remplace. Quant au rôle de la femme, il évolue : pour conquérir Wall Street, il faut en finir avec l’éternel uniforme aux airs de femme-enfant et adopter le combo power suit aux larges épaules qui s’impose dans la mode des années 1980. Pourtant, à la fin des 90’s, le capri pants renaît. Hasard ou pas, la culture adolescente renaît elle aussi. Magazines de stars, programmes sur MTV ou encore lancement de la chaîne Filles TV en 2004, l’univers pour gamine espiègle subit une relecture Y2K. Baskets plateformes, t-shirts à message, le capri compose les looks de la collégienne incarnée par Hilary Duff dans Lizzie McGuire, mais aussi ceux de de Miley Cyrus dans Hannah Montana et Mischa Barton dans Newport Beach (The O.C.). Au-delà de l’écran, il s’impose sur le tapis rouge, accessoirisé avec des sandales compensées, chevelure coiffée de fleurs et t-shirt à paillettes. Il habille aussi bien J-Lo que Rihanna, Beyoncé ou encore Britney avec bottes moulantes et gavroches. Ma théorie ? Le pantacourt devient le symbole d’adolescentes médiatisées vivant entre le statut d’enfant et celui de business woman.
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Alors pourquoi un retour aujourd’hui ? En jean surmonté de broderies ou en version imprimée, le pantacourt s’expose sur TikTok accompagné de conseils pour l’acquérir version green et upcyclée.
Le tout est escorté du hashtag #Y2Kfashion comme sur les looks de Devon Lee Carlson : tongs à talons et mini-top à dentelle, son modèle évoque la tendance actuelle dollcore.
Au-delà de la nostalgie, la pièce est simultanément fonctionnelle et flirty, caractérisant le monde post-Covid. Du pantacourt de yoga porté au quotidien par Bella Hadid signé Miaou à la version soirée composée de sequins chez Cultform, le capri passe du daily wear au evening wear en un clin d’œil. Vêtement hybride par excellence, il n’en finit pas de raconter une ère de porosité entre les rôles et les sphères.