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Entering my villain era : je rêve d’être la “Méchante” du film

Je préfère être terrifiante que “gentille”, une villainess qu’une “fille à problèmes” – et refuser culpabilité et saviorism pour interroger la “déviance comme forme de dissidence”.

When all else fails, je re-regarde Maléfique. Je me délecte de chaque apparition glorieusement camp d’Angelina Jolie, la poussière electric green qu’elle souffle lors d’un vilain sort, ses cornes, ses ailes, son contouring.

À travers divers maux de la vie et quêtes d’empuissancement, je me tourne vers une poignée de hyperfem baddies que je chéris. Il y a Megan Fox dans Jennifer’s Body, vampire au gloss à paillettes qui boit le sang de lycéens dragueurs (cela aurait des vertus fabuleuses peau & cheveux). J’aime aussi le rire caverneux de Cruella d’Enfer et ses capes en dalmatien (véganes), j’aime Sharon Stone dans Basic Instinct, Glenn Close dans Liaison fatale, Miranda Frost dans Die Another Day. Méchante parce que… phallique, castratrice, diabolique, séductrice, perverse ? Que des mots flous, bibliques, qui m’enchantent totalement – précisément car ils dénoncent, en creux, le regard patriarcal et sans appel projeté sur toute féminité dissidente.

Important point to note : celle que je nomme “la méchante” n’est pas une mean girl – en opposition à la good girl, dont le seul but semble de finir avec le BG du lycée. Non, ma “méchante” ne dévore pas son noyau dur, mais l’arme et l’alerte contre le système dont elle fait les frais. Elle questionne et retourne des stigmates lourds de la morale judéo-chrétienne. Le terme, entre les mains du dominant, prend, ironically enough, une tout autre couleur : pourquoi méchante et non adversaire ? Calculatrice plutôt que stratégique ? Séductrice plutôt que politique ?

Je ne suis pas la seule à me questionner et à embrace mon inner villain : cette trend recouvre plus de 7 milliards de vues pour #villain et 148,6 millions de vues pour #villainera sur TikTok. Une sensibilité qui englobe des sous-courants comme la “dark feminine era”, ce look gothic victorian revu Y2K attribué à Gabbriette ou Amelia Grey. Villain, you know it, c’est aussi un clin d’œil à la phrase iconique de Cassie dans Euphoria : “Well if that makes me a villain, then so f*cking be it.” D’accord ou pas avec les choix de Cassie, c’est une autre histoire ; une chose est sûre, elle s’oppose dès lors à la culture américaine du popularity contest, refusant d’être une people pleaser, une goodie two-shoes, docile, souriante, sympa à toute heure.

Sorcière sorore plutôt que mean girl

Au risque de me répéter : la méchante dont je rêve comme sœur spirituelle et alter hero fantasmé a plus à voir avec la figure de la sorcière, que Mona Chollet décrit dans son ouvrage Sorcières comme une “femme affranchie de toutes les limitations, de toutes les dominations” qui “offrait la jouissance de la revanche sur un adversaire qui vous avait sous-estimée”. 

La OG des sorcières, la démone originelle, est la figure biblique Lilith, première femme d’Adam, qui a tout simplement, en live depuis Eden, refusé la position du missionnaire. Elle est alors envoyée aux enfers, condamnée à ramper à tout jamais, simplement pour avoir questionné la hiérarchie entre elle et son then-boyfriend. Rousse, parée d’ailes, elle “tromperait” par son allure féminine trempée de “séduction”, dont elle aurait une maîtrise parfaite et tactique. Shame on her ! (lol) 

À travers l’histoire, les sorcières, les méchantes, les marâtres, des contes de fées aux witch hunts, répondent au besoin de tout système d’“ériger un bouc émissaire”, bannir un corps indocile, contenir une “gêneuse” qui voudrait “renverser un ordre symbolique et un mode de connaissance qui se sont construits explicitement contre elles”, dixit Mona Chollet.

Et trop souvent, ces récits racontent en creux une agression sexuelle étouffée, dont l’agresseur se dédouane précisément au moment il désigne le blâme originel, contenu dans l’essence même de sa victime. Il suffit de voir Pussy Galore dans Goldfinger en 1964 se débattant contre James Bond et présentée comme sa femme-piège.

Bad boy vs fille de mauvais genre

Jean-Victor Blanc, fondateur du festival Pop & Psy et psychiatre spécialisé dans les questions de genre, de santé mentale et de pop culture, explique que, dès l’enfance, le petit garçon peut être encouragé à “littéralement ‘jouer’ au méchant, inverser les rôles et les camps, tantôt Dark Vador, tantôt Jedi”, contrairement à l’éducation classique féminine. “La fille va par la suite tendre à se tourner et attaquer sa propre intériorité lors de troubles adolescents, se tournant par exemple vers les troubles alimentaires et la scarification et non une agressivité externe, qui devient réprimée et plus remarquée et tolérée, typiquement, chez les garçons.”

Tout débordement est cadré, stigmatisé, pathologisé. “Entre résistance, révolte, adaptation au système ou résignation, elles troublent l’ordre du genre et le contrôle social”, écrit l’historienne Véronique Blanchard dans ses portraits des Mauvaises Filles, qui refusent “réserve, modestie, virginité” dans une structure sociale “qui visera leur redressement moral et les verra emprisonnées, infantilisées, médicalisées pour les faire se tenir tranquilles.”

Et cela transparaît dans la pop culture, qui accompagne, excuse, célèbre même des marginalités… masculines uniquement. A travers les époques, la figure du “mauvais garçon”, du “polisson”, du “coquin” ou “bad boy” génère fantasmes et excitations (et doubles standards) sur des générations (cf. James Dean), tandis que sa version féminine fait face à une réprimande stigmatisante médiatique et culturelle : Zahia, Amy Winehouse ou Courtney Love, les voilà pointées du doigt comme “fille à problèmes” ou “mère indigne”, “allumeuse”, “qui cherche la m##”, “qui ne l’a pas volé”. Mais “volé” quoi exactement ? 

@boohoo When my friends ask me if I think I’m the drama #christinequinn #sellingsunset #boohoo #fyp ♬ original sound – boohoo

Je préfère être la “méchante” que la “gentille”

Véronique Blanchard interroge la frontière fine entre “déviance et dissidence”, basculement qui invite à repolitiser ce qui n’est plus une “sortie de piste” mais des contre-systèmes en devenir de savoirs et solidarités féminines. À commencer par les maux et les mots que l’on place sur soi : à choisir, je préfère être la folle que fofolle, méchante que vilaine, terrifiante qu’hystérique. C’est déjà un début… and we’re just getting started (rire machiavélique).

Entre le marketing décomplexé de l’intimité de ses filles par Kris Jenner dans la machine Kardashian et Julia Fox qui crie haut et fort tirer avantage de la “promotion canapé” et “utiliser” les hommes riches, je rêve aujourd’hui de personnages féminins et féministes ayant tout simplement le droit à de la complexité narrative. Je pense notamment aux personnages de The White Lotus et au nuancier d’émotions et de décisions ambivalentes que leur accorde le showrunner. Ni bien, ni mal, ni gentilles, ni toxiques, mais aux prises avec une société où les outils, les désirs, les trajectoires reflètent le climat même qui les a vus naître. Le champ de l’identité narrative féministe, comme exploré par Alice Zeniter, encourage à redorer le blason et garder en vie celleux destiné.e.s à mourir dès la première scène, à ne pas les condamner à n’être qu’une meilleure amie effacée, un personnage secondaire à peine écrit, une maîtresse indigne à fustiger.

Je viens de réaliser : pourquoi aspirer à des valeurs “féminines” soi-disant vertueuses si elles ne feront pas de moi la gentille de l’histoire, mais tout simplement une fille… gentille ? Pas de syndrome du messie en VF (version fille) mais, dans le meilleur des cas, une princesse attendant d’être charmée, sauvée, en adéquation parfaite avec la culture du saviorism du moment. Reprendre la main sur la fin du récit et sa chute inespérée, écrire sa propre résolution, définir son happy ending – à moi le manoir enfumé, les corbeaux, et la punchline finale – en ayant surpris le gaze que j’avais moi-même intériorisé.

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