Quelles sont tes plus riches contradictions ?
Eh bien premièrement, il y a le fait que je raconte toute ma vie dans mes chansons alors que je suis incapable de parler de mes émotions à mes ami.e.s. Il y a aussi le fait que je dénonce plein de choses dont je n’arrive pas à me défaire moi-même, comme cette dictature de l’apparence : je suis la première à conseiller aux gens de se foutre de l’avis des autres alors que moi, je me mets une pression incroyable sur mon apparence. Un peu moins aujourd’hui, mais avant, j’étais obnubilée par ça. J’ai des années d’anorexie derrière moi, des années à me rabaisser, à me dire que si je ne suis pas belle, je ne vaux rien, alors qu’en même temps, j’encourage quelqu’un d’autre à être soi-même. Je suis pleine de contradictions, et c’est ça qui fait que je suis un être humain, un être imparfait et surtout, j’ai arrêté d’essayer d’être cohérente.
Comment veilles-tu à préserver ton état mental en étant aussi exposée, avec les responsabilités qui vont avec ?
Quand tu es exposé.e, tout le monde attend quelque chose de toi. Peu importe qui est cette personne, un.e ami.e, quelqu’un avec qui j’ai déjà travaillé, même dans l’intimité, on a une attente envers moi. Quand ça concerne uniquement l’entourage, c’est déjà assez intense, mais quand c’est tout le monde, ça devient un peu plus chaud à vivre au quotidien. En ce moment, j’ai une psy qui me suit toutes les semaines. Je ne pourrais pas arrêter de la voir car c’est la seule solution pour être bien, que tu sois connu.e ou non. Parler de ta vie et de tes sentiments à quelqu’un, c’est libérateur. Je ne dirais pas que tout le monde doit faire une thérapie dans sa vie, mais me concernant, c’est obligatoire. Je me sens bien et équilibrée car j’ai une psy et je sais que si je ne vais pas bien, ce n’est pas grave et que j’ai déjà connu pire. Je suis aussi très bien entourée, mes ami.e.s valorisent la santé mentale et on en parle beaucoup entre nous, j’en parle aussi beaucoup avec ma mère et mes proches, ce n’est pas tabou du tout, je me suis entourée de gens avec qui c’est un sujet normal.
Quelles sont les chansons qui t’émeuvent ?
Je me suis pas mal découverte par le biais d’autres chansons. Barbara est l’artiste à laquelle je me suis le plus identifiée, car elle exprime des émotions que je n’arrivais pas à verbaliser – elle parle de tout, de solitude, de chagrin, de nostalgie, de tristesse, d’amour, d’amitié. Je l’ai découverte à 8 ans et jusqu’aujourd’hui, il reste des chansons que je n’ai pas encore écoutées. C’est ce que je fais avec les artistes que j’aime beaucoup, je n’écoute pas toute leur discographie, je veux continuer de les découvrir. Ce qui est cool dans la musique et dans l’art en général, c’est que tu ne sais jamais qui va voir ou écouter ce que tu fais mais cette personne peut le partager à l’infini et à n’importe quelle époque. Pas besoin de réseaux sociaux ou que sais-je, tu peux exister par la transmission et c’est incroyable. Par exemple, Barbara, ce n’est pas du tout de ma génération et pourtant, c’est mon artiste préférée. La musique et l’art, ça résonne avec des endroits dans ton être qui sont cachés ou dont tu ne connais pas encore l’existence, et c’est pour cela que c’est si intense. Il y a des artistes qui prononcent des mots que tu n’aurais jamais osé dire ou penser, qui mettent un doigt sur ce que tu ressens, c’est magique.