Peux-tu me parler de ton enfance baignée dans le cinéma ?
Le cinéma est arrivé par l’expérience de mon père, le tout enveloppé d’une ambiance de Rome des années 70. La maison était pleine d’artistes, de musiciens, d’acteurs, de réalisateurs, c’était vraiment une époque dorée du cinéma italien avec la Cinecittà. Quand on baigne dans une atmosphère de gens qui sont vraiment des artistes dans leur manière de vivre, qui sont très libres, on ne se voit pas travailler dans une banque après ça – on préfère danser avec eux. Quand j’étais petite, je voulais d’abord être danseuse, je faisais de la danse classique et je regardais les danseuses étoiles en rêvant. Puis, à 13 ans, j’ai vu Cabaret et le rôle de Liza Minnelli m’a totalement bouleversée, fascinée et j’ai compris qu’on pouvait à la fois danser et jouer un rôle. Et puis, petit à petit, j’ai formulé que je voulais être actrice ; ma mère était circonspecte – parce qu’elle avait vécu avec un acteur et qu’elle avait vu toutes les complications de ce métier –, mais j’ai toujours eu un goût pour les montagnes russes. Le succès de mon père – qui était une grande vedette en Italie – me lançait un défi. J’ai toujours essayé d’être à la hauteur de ce père plus grand que nature.
Tu as également grandi proche du milieu de la mode. Qu’est-ce que cela t’a apporté ?
Ma mère a travaillé pendant vingt ans chez Christian Dior. J’étais jeune adolescente quand j’ai commencé à côtoyer ce monde. Ma mère, mon frère et moi étions revenus vivre en France et j’étais fascinée par tout ça. En même temps, c’était beaucoup. Ma mère vivait au rythme des collections, elle parlait de bijoux et de chiffons… J’ai finalement fait un rejet. Je me suis rasé la tête à 15 ans, je m’habillais sans suivre aucun code, des mélanges très poussés qui faisaient qu’on m’appelait l’excentrique à l’école. Mais comme le fruit ne tombe pas loin de l’arbre, ma mère, qui s’occupait des bijoux, de la maroquinerie, des foulards et de la maille et qui avait beaucoup de goût, m’a appris à “voir”. Alors même si je suis plutôt jean-boots – ou quand j’ai envie, je bifurque vers le délirant – et que je ne passe pas ma vie dans les boutiques, j’ai appris d’elle à ne pas suivre les tendances et à porter un regard personnel sur l’élégance.
Quels ont été tes rôles les plus marquants ?
Il y a eu Trois hommes et un couffin bien sûr, pas juste à cause du succès mais parce que ça inaugurait la figure de la mère ingrate, qui m’a ensuite été offerte en permanence. Ce film marquait ma rencontre avec Coline Serreau, avec qui j’ai aussi fait La Belle Verte et Dix-huit ans après. Un très joli film, Camomille de Mehdi Charef où je joue une bourge junkie qui se faisait sauver par un mitron qui avait construit une voiture dans son grenier. Et puis il y a eu L’Amour en héritage, Neuf Mois, entre autres… Les rôles qui arrivent dans la vie d’un acteur ont toujours du sens, ils résonnent avec des chemins qu’on essaye de comprendre, ça n’arrive jamais par hasard. Sylvie aussi m’apprend la vie. C’est pour ça que pour moi, c’est dur de dire ce que j’aimerais jouer, car j’ai toujours trouvé que la vie me proposait des rôles qui sont encore de l’ordre de l’inconscient, qu’elle me permet de voir et de vivre.