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Noël, Insta, les stars et ma famille

Comme chaque année, les stars renouent avec la chorégraphie des posts Instagram célébrant une période de fêtes aux coloris carmin et blanc scintillants. Entre visée promotionnelle et partage authentique, l’attente de ces images fait désormais partie de nos traditions festives 4.0. C’est grave, Docteur ?

@mariahcarey

Chicago West et Dream Kardashian séquestrant leurs poupées elfes, Britney Spears partageant son premier sapin post-tutelle, ou encore le couple gravure de mode Victoria et David Beckham se prêtant au jeu du pull moche de Noël : sur Instagram, les célébrités se livrent à leurs rituels de fin d’année. Comme avec des connaissances intimes, on ne peut s’empêcher de commenter l’évolution de leurs décorations et la composition de leur vestiaire de fêtes.

 

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Des chaussettes de laine rouge accrochées à la cheminée de la villa californienne de Kendall Jenner aux recettes de friandises revisitées avec une dose de CBD chez la cheffe star Martha Stewart en passant par l’éternelle mini-robe rouge sexy de Mariah Carey : les traditions sont relues et actualisées avec une dose de second degré et de sous-textes coquins. Cette large hybridation en ligne permet à chacun.e de composer son propre “esprit de Noël”.

Dans ma famille, on m’a souvent répété – sans me présenter une liste de critères objectifs – que je n’avais pas l’esprit de Noël. Il est vrai que je confonds les noms des enfants de mes cousins : Léa, Clara, Sarah (ne me demandez pas pourquoi). Les métiers des boyfriends interchangeables de ma tante m’échappent, et je feins mal de rire aux blagues graveleuses de “proches de la famille” non identifiés qu’il faut appeler tonton. Si l’esprit de Noël consiste à faire partie de ce drôle d’orchestre, j’admets mon échec.

Pourtant, je crois profondément à la magie de Noël. Je connais chaque carte de fin d’année de la famille Kardashian – avec une préférence pour celle de 1990 en total look cuir –, je m’inquiète de la bonne entente entre les enfants de Jennifer Lopez et Ben Affleck, et trépigne de découvrir les tenues de fêtes d’ASAP Rocky et Rihanna.

Leurs incroyables récits, enfermés dans le monde des écrans, sont un peu les miens. Ils m’accompagnent d’année en année. J’attends leur joie et comprends leurs difficultés. L’étrange familiarité nourrie envers ces individus spectaculaires, qui ne me connaissent pas, a commencé très tôt. Les titres people Gala, Paris Match, Voici faisaient partie de mes livres d’enfant. Chaque samedi, j’accompagnais ma grand-mère en quête de ces trésors, où le trivial de la vie terrestre n’existait plus. On regardait ensemble les stars se confier, divorcer, fêter les succès et composer un mythe du bonheur évoluant avec les frayeurs des époques. Tel était notre rituel. Les fêtes de Noël figuraient parmi les événements particuliers suscitant notre attention. En cette période magique, la vie tellurique des stars prenait une allure plus humaine alors que nos existences de mortelles semblaient un peu plus exceptionnelles.

Je crois profondément à la magie de Noël. Je connais chaque carte de fin d’année de la famille Kardashian, je m’inquiète de la bonne entente entre les enfants de Jennifer Lopez et Ben Affleck, et trépigne de découvrir les tenues de fêtes d’ASAP Rocky et Rihanna.

Durant cette parenthèse enchantée, les rituels des célébrités sont similaires aux nôtres : elles préparent des repas, réunissent ex-mari, enfants et échangent des cadeaux – certes plus onéreux. Comme nous, elles sont nostalgiques et partagent des souvenirs. Aujourd’hui, Instagram permet un accès instantané à ces préparatifs et les clichés en noir et blanc des Noëls passés se mêlent aux contenus promotionnels…

En apparence, les choses se ressemblent mais l’asymétrie entre ces semi-dieux et nous demeure. Paris Hilton ne m’a jamais envoyé de carte de vœux personnalisée, et Justin Bieber ne verra jamais mon pyjama orné de cerfs alors que je connais le sien. Au fil des années, j’ai découvert que ces liens à sens unique tissés avec les célébrités portaient un nom : “relations parasociales”. La naïveté consentie, le plaisir de s’échapper par le prisme de la vie privée des stars, seraient des pathologies. Je vous avoue que le diagnostic ne me convainc pas.

Les stars et nous

Le trouble “parasocial” serait-il le mal de notre civilisation hyperconnectée ? Évidemment, les réseaux sociaux et la présence accrue des célébrités en ligne invitent à nourrir cette asymétrie. En offrant toujours plus de contenus personnels, les stars s’insèrent dans nos quotidiens. Leur vie intime se loge dans le prolongement de nos mains, enfermée dans nos portables, accessible à toute heure. Mais ce phénomène précède le téléphone mobile et les applications de réseaux sociaux. Il existerait depuis la télévision, défini pour la première fois en 1956, sous la plume de Donald Horton et R. Richard Wohl, deux chercheurs américains en sciences sociales. Selon eux, dans les relations parasociales, le spectateur se sent proche d’une figure – sans s’imaginer à sa place – et interagit avec elle comme avec une autre personne. Nul doute que ces liens témoigneraient d’une société plus individualiste, en perte de repères.

Avec son goût pour les potins de stars, ma grand-mère m’aurait rendue parasociale ? Insociable, recluse, confondant Kris Jenner et ma propre mère ? J’ai juste évité certaines discussions familiales et oublié les prénoms de quelques cousins, préférant à leurs récits les rebondissements de la vie de Britney ou Kim K.

Regarder les stars les plus populaires, c’est regarder le monde dans lequel on vit, comprendre les aspirations d’une époque et ses valeurs. Me balader entre les comptes Instagram de célébrités me rend nostalgique des instants d’errance passés avec ma grand-mère au milieu de la cohue de fin d’année. Nous sommes toutes deux à marmonner, plus proches que jamais : c’est ça, la magie de Noël. Les posts des stars ne nous éloignent pas. Chaque jour, on s’échange des milliers de messages composés de mèmes, utilisant les codes de la pop culture qui nous lient. Paris Hilton avec une dinde jouant son éternel rôle d’héritière potache, le souvenir de jours heureux où Kanye West faisait de la luge avec ses enfants : ces images festives des stars s’échangent au gré des réseaux avec nos nouvelles familles. Celles qu’on a choisies, et qui ne nous obligent pas à manger de la bûche Picard 3 chocolats.

 

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