Aujourd’hui, la santé mentale des artistes est en train de devenir un vrai sujet au sein de l’industrie musicale. On s’éloigne peu à peu de l’image de l’artiste torturé, que tu as pu incarner, parfois à tes dépens. Quel regard poses-tu sur ce changement ? Et sur tes propres émotions, lors de la création ?
Je ne pense pas que la création puisse naître d’un état émotionnel trop plat. On n’écrit pas de la musique juste pour faire la fête, ou alors ça devient de la musique un peu navrante. On raconte de l’humain, et l’humain est torturé. Je ne pense pas que ces problèmes-là soient présents uniquement dans l’industrie musicale. Les artistes ne sont pas plus à plaindre que d’autres… Malgré une vie bancale au niveau financier ! Leur souffrance est sans doute davantage mise en lumière parce qu’elle est particulièrement exposée.
Il faudrait donc aller mal pour créer ?
Non, je ne fais pas de musique que quand je vais mal ! En l’occurrence, Ultra Dramatic Kid évoque une rupture. Il marque vraiment un moment où je me suis rattaché à la musique pour traverser une période difficile. Mais d’autres morceaux plus anciens, comme “En Lea”, ont été créés dans des phases de pur bonheur. Je n’ai pas besoin d’être tourmenté pour produire.
Dans ce cas, est-ce que tu développes des rapports différents avec les morceaux selon ton humeur quand ils sont nés ?
Non, je ne suis pas traumatisé par mes morceaux ! Finalement, en studio, je passe de bons moments. Pour Ultra Dramatic Kid, les moments en studio incarnaient de véritables bulles où je pouvais me réfugier, où j’avais l’impression d’avancer, tandis que ma vie était plus angoissante. Si je vais trop mal, je ne mets pas un pied en studio.