Elle a conquis la chanson française avec Petite Amie. En 2021, Juliette Armanet revient littéralement on fire. Avec Brûler le feu, la chanteuse signe un second album aussi fougueux que cathartique. L’artiste, qui a réussi l’exploit de nous ensorceler avec un univers so disco, se livre sans tabou sur les vertus purificatrices de sa musique, les personnalités qui l’ont forgée et ses mille et une vies.
Quel message as-tu voulu passer avec cet album ? Qu’est-ce que ça signifie pour toi de “brûler le feu” ? Certains parlent d’une référence à Johnny, d’autres à la passion ou encore la destruction…
Pour moi, brûler le feu, c’est une formule, une sorte de mini-poème un peu surréaliste qui veut tout et rien dire. En vérité, ça rejoint quelque chose d’assez intime dans la démarche de cet album qui, justement, n’était pas du tout une démarche destructrice. L’idée, c’est que ce ne soit pas le feu qui me brûle mais que je puisse brûler le feu comme une sorte de petit mantra intérieur. Finalement, ce feu-là peut être créateur, il peut être un foyer, il peut être lumineux, chaleureux, celui qui transforme le plomb en or, les blessures en quelque chose de cathartique, de puissant et de libérateur…
Pour moi, c’est vraiment comme une sorte de petite prière, un slogan intérieur d’insurrection. Certes un peu flower power mais un peu rock aussi, pour dire qu’on est plus fort que la mort. On peut dépasser ses blessures, on peut les chanter, on peut en faire quelque chose qui nous aide à avancer. Pour moi, ce disque a été synonyme d’une certaine libération à plein d’égards. Autant en tant que femme dans ma vie personnelle qu’en tant que musicienne où j’ai eu la sensation de lâcher les chevaux, d’oser des choses que je n’aurais jamais osées auparavant. Brûler le feu, c’est un éloge du désir, des passions fortes pas pour ce qu’elles ont de destructeur mais pour ce qu’elles ont de créateur.
Peux-tu nous en dire un peu plus sur le processus de création ? Est-ce qu’il a eu des vertus cathartiques dans ta vie personnelle ?
Ce qui est sûr, c’est qu’on a peur du deuxième album, surtout quand le premier a été aussi bien accueilli. Finalement, est-ce qu’on ne va pas briser le coup de foudre, l’histoire d’amour avec le public ? Comment maintenir une belle histoire sans casser la lune de miel ? J’ai l’impression que j’ai inversé cette peur en me disant : “Allons-y à fond.” Ne t’impose pas des règles à toi-même, d’être ce qu’on attend de toi, ou de ce que tu crois qu’on attend de toi. Au contraire, libère-toi au maximum, expérimente, cherche, essaye, prends des risques parce que c’est la meilleure manière de contrer la peur. C’est se jeter dans le vide en se disant “Allez, on y va, on essaye”.
Sur ce disque, j’ai cherché à créer des accidents, j’ai cherché du danger, de l’audace. Faire venir, par exemple, des cordes, c’est un truc que je n’avais jamais fait auparavant. D’oser s’en servir vraiment bien de manière lyrique… Et donc, finalement, cette histoire de pression, j’ai eu l’impression d’essayer d’inverser la vapeur en me disant qu’être musicien, c’est un chemin de vie avant tout. On fait les albums avant tout pour soi-même, pour se faire du bien, pour chanter les blessures, pour les penser, pour les libérer… Donc, ça a été un vrai cheminement et une vraie histoire d’amour, avant tout avec la musique sur ce disque parce que je suis rentrée à fond dans chaque couche d’arrangements. Je me suis passionnée pour ça. Pour le moindre son de caisse claire, le moindre riff de guitare, c’était des débats enflammés. Il y a un truc qui s’est vachement libéré en tant que musicienne dans le processus de ce disque. Ça m’a fait vraiment du bien d’avoir cette casquette de chef d’orchestre ; je me suis vraiment éclatée.