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Musique

Les rêves de Bilal Hassani

Les rêves de Bilal Hassani ont “toujours été plus grands que les obstacles” sur son chemin. Après en avoir réalisé déjà plus d’un, l’artiste veut voir les choses en grand… Rencontre avec une icône de sa génération.

Photographe : Quentin Saunier
Styliste : Nicolas Dureau

Mardi, 14h30 : j’ai rendez-vous avec Bilal Hassani. Pas une minute d’avance, ni une de retard : l’artiste est ponctuel. Avec un sourire lumineux, il ouvre grand les bras et sacrifie quelques centimètres de distanciation sociale au profit d’un salut chaleureux. Quelques secondes suffisent à Bilal pour vous faire entrer au cœur de son intimité : celle d’un petit garçon devenu icône de sa génération.

Le parcours de Bilal, c’est l’histoire d’un rêve qui se réalise, mais aussi du prix qu’il en coûte pour s’imposer là où nul ne vous prédestinait : “Quand tu t’appelles Bilal, que tu as grandi dans une tour aux Ulis, que tu es clairement homo, et que tu veux devenir la plus grande pop star de la planète, tu sais tout de suite que ça ne va pas être facile.” À 14 ans, il interprète “Rise Like a Phoenix” – titre avec lequel Conchita Wurst a remporté l’Eurovision en 2014 – sur le plateau de The Voice Kids. Un choix prémonitoire. En 2019, c’est lui qui est choisi pour représenter la France à l’Eurovision. Ciblé par des vagues de cyberharcèlement d’une violence inouïe, il poursuit son chemin et sort Kingdom. Un premier album sur lequel il dédie le titre “Jaloux” à ses haters. Un an – et un feat. avec Alkpote – plus tard, Bilal enchaîne avec Contre Soirée, un second disque marqué par une production plus radicale et par la présence des icônes Zahia Dehar et Loïc Prigent, dont on retient “Flash” et “Control”, mais surtout la ballade intime “Tom”. Derrière des riffs de guitares saturées, le chanteur déploie sa voix et retrouve “ce petit garçon dont personne ne connaissait le nom” pour contempler sa propre métamorphose. “Rise Like a Phoenix”, again.

Alors qu’il s’attelle à la production de son troisième opus, Bilal Hassani a accepté de relever le défi de Danse avec les stars. Depuis le 17 septembre, il est le premier homme à danser au bras d’un homme sur le plateau de TF1 – “une évidence” selon lui. L’occasion parfaite pour se rencontrer et parler des milliers de rêves qu’il lui reste à vivre.

Bilal Hassani en DESIGUAL x MARÍA ESCOTÉ

Manteau & foulard porté en top DESIGUAL x MARÍA ESCOTÉ
Pantalon AMINA MUADDI x WOLFORD
Collier LARUICCI

Bilal Hassani en DESIGUAL x MARÍA ESCOTÉ

Salut Bilal ! Alors comme ça, tu participes à Danse avec les stars ?

(L’excitation monte subitement dans le bureau) Danse avec les stars, oui !!! Je ne peux pas trop en dire, mais on prépare quelque chose d’historique (Bilal révélera quelques jours après notre entretien qu’il sera le premier participant masculin à danser au bras d’un homme, ndlr). En termes de représentation, c’est important. Je suis très heureux de pouvoir le faire. Ce sera aussi l’occasion d’apprendre à mieux me connaître… C’est un programme bon enfant, good vibes ! L’occasion de se sortir du trou dépressif qu’ont été ces deux dernières années.

L’Eurovision, deux albums, une tournée… Et maintenant, DALS. Le burn-out, ça ne te fait pas peur ?

Aujourd’hui, en réalité, ça va. La première année d’exposition médiatique a été intense. Les jours de repos n’étaient pas de vrais jours de repos, et on ne se rendait pas compte, Maman et moi, du rythme que l’on s’imposait. Il y avait de l’adrénaline, donc on a continué à tirer un peu sur la corde la deuxième année avant de frôler le burn-out à la fin 2020… Aujourd’hui, on essaie d’équilibrer tout ça. Il y a beaucoup de choses que j’ai envie de faire, et pas assez d’heures dans une journée. Je dois donc penser sur le long terme pour préserver mon énergie.

Quelle image avais-tu du monde de la musique avant de lancer ta carrière ? Ta vision est-elle différente aujourd’hui ? 

J’ai toujours été plutôt bien informé sur la réalité de ce milieu. Après, s’informer est une chose et le vivre en est une autre. J’avais peut-être un peu idéalisé les choses… Ce qui est difficile à comprendre lorsque l’on commence, c’est qu’on n’est pas dans une série américaine. C’est un travail ! Sinon, je pense que les choses sont assez simples à lire : il faut savoir s’entourer de bonnes personnes, et surtout apprendre à éviter les mauvaises. Ce que je n’avais pas anticipé, c’est à quel point on peut parfois se sentir seul. Dans mon cas, ce qui a été le plus perturbant, ça a été d’être, du jour au lendemain, autant aimé que détesté. Tout s’est mélangé et j’ai très vite dû apprendre à me protéger.

Bilal Hassani en robe et leggings Diesel

Robe & legging DIESEL
Gants MUGLER

Qu’est-ce qui t’a donné la force de traverser ces vagues de haine ?

Mon rêve a toujours été plus fort que les obstacles sur ma route. Quand tu t’appelles Bilal Hassani, que tu grandis dans une tour aux Ulis, que tu es très clairement homosexuel et que tu dis vouloir devenir “la plus grande star de la planète”… Tu te rends vite compte que ça ne va pas être facile. Mais j’avais déjà vécu tellement de souffrances que l’attention que je recevais, qu’elle soit bonne ou mauvaise, me prouvait surtout que mon travail portait ses fruits. Le chemin sera probablement encore périlleux ; mais s’il n’y avait pas le combat, je pense qu’il n’y aurait pas le rêve. Si j’étais un little white kid des beaux quartiers et que j’avais une grande voix, je ferais peut-être de la finance ! C’est le défi de rendre possible l’impossible qui m’a donné l’impulsion nécessaire.

Les choses ont l’air plus tranquilles aujourd’hui…

Pour l’instant, tout va bien ! On en reparle après le 17 septembre… (Il éclate de rire.) Le moment de l’Eurovision a été particulièrement difficile car les gens s’agaçaient de me voir représenter le pays. On ne voulait pas de quelqu’un comme moi en porte-drapeau… Aujourd’hui, j’ai appris à atteindre un certain public sans trop m’adresser à l’autre. La sortie de Contre Soirée, par exemple, était beaucoup plus agréable que celle de Kingdom. On est passés inaperçus auprès des gros rageux, et je dois dire que ça fait du bien !

Cet été, tu as officialisé ta relation avec le couturier Cassem Jebrouni. Être en couple, ça t’aide à gérer tes émotions ?

Compte tenu de mes ambitions, je n’ai jamais été très fan de relation amoureuse. Le but, c’est que je chante sur Mars à la fin de ma carrière donc je n’ai pas le temps de perdre mon temps. Mais cette histoire m’est tombée dessus… Et elle m’aide, c’est vrai. Je réalise qu’il est rassurant de pouvoir se retrouver avec quelqu’un de différent, qui sait être suffisamment tendre et sincère quand il le faut. Ensemble, on prend le temps de faire de vraies choses, d’avoir une vraie vie… C’est quelque chose qui me manquait sans que je ne le sache.

Le chemin sera probablement encore périlleux ; mais s’il n’y avait pas le combat, je pense qu’il n’y aurait pas le rêve.

Bilal Hassani en Mugler

Robe, gant, collant et escarpins MUGLER

Bilal Hassani en Mugler

Sur la cover de “Baby”, tu apparais entièrement nu. Quel rapport entretiens-tu avec ton corps aujourd’hui ? 

La question de ma propre beauté a toujours été difficile à aborder. Petit, je ne me trouvais pas beau, et j’ai encore beaucoup de mal à être à l’aise face à un miroir. Le rapport à soi se complique lorsque tu commences à voir ton visage sous tous les angles. À un moment, je ne pouvais plus du tout me voir en photo. Alors poser nu… J’en aurais été incapable il y a encore quelques mois. Ces derniers temps, je commence à prendre un peu confiance en moi ; en partie grâce à mon couple. Que des fans te disent qu’ils te trouvent beau, c’est une chose ; que ta mère te dise que tu es le plus bel enfant du monde, ça fait plaisir évidemment. Mais lorsque tu partages ton intimité avec quelqu’un, et que cette personne te complimente sincèrement… Il y a un vrai impact sur la perception que tu as de toi-même. On oublie trop souvent de se complimenter. Si vous avez de bonnes choses à dire, dites-les !

Avec cette photo, tu questionnes la représentation du genre. C’est quoi pour toi le genre ?

Le genre, selon moi, c’est un spectre sur lequel on se situe. En ce qui me concerne, je m’identifie aujourd’hui comme un homme cisgenre, mais ce n’est pas figé. On peut douter et il est important de s’écouter. Ignorer mes doutes, c’est prendre le risque de me trahir ou de louper quelque chose qu’il ne faut pas que je loupe. J’essaie de rester self-aware, et de garder la liberté de voir ce qui pourrait se passer à l’avenir. En tout cas, il reste un long chemin à parcourir avant que le monde ne comprenne toutes les subtilités du genre… C’est d’ailleurs embêtant de voir que l’on utilise encore parfois mon exemple pour parler de transidentité. C’est injuste pour les personnes transgenres qui ont un discours et des expériences qui sont différentes des miennes, et qui doivent être entendues.

Pourquoi est-ce si important de faire ce que tu fais ? 

Au début, c’était un objectif très personnel mais cette dynamique a évolué quand le public s’en est mêlé. Tout à coup, je n’étais plus le seul concerné. J’ai compris qu’il y avait quelque chose de politique dans mon existence et que, au-delà d’être un artiste, j’existais pour permettre à d’autres personnes comme moi d’exister.

Bilal Hassani en DESIGUAL x MARÍA ESCOTÉ

Pull & legging DESIGUAL x MARÍA ESCOTÉ
Bottines CHRISTIAN LOUBOUTIN

En avril dernier, tu as sorti le single “Lights off”. Un album est-il dans les cartons ? Que peux-tu nous en dire ?

J’ai passé tout le début de l’année en studio et une première partie de l’album est déjà achevée. Le souci, c’est que ça fait tellement longtemps que j’ai presque envie de tout recommencer. Là, je me concentre sur DALS avant de retourner en studio pour le terminer. Je veux voir où j’en serais, de quoi j’aurais envie de parler à ce moment-là. Je veux prendre le temps d’explorer plus de possibilités mais je ne prendrai pas mille ans non plus. J’essaie d’être minutieux tout en restant spontané. En tout cas, j’aime beaucoup le travail d’écriture.

Qu’est-ce qu’il te reste à faire, Bilal ?

Tellement de salles à conquérir… Le Zénith, Bercy, le Stade de France ! J’adorerais faire le Madison Square Garden, bien sûr ! La Wembley Arena, puis le Wembley Stadium… Le Tokyo Dome ! Ce serait mon rêve. Je voudrais chanter partout et pouvoir partager ma musique avec le monde entier. J’aimerais écrire une chanson avec Mariah Carey. Proposer des projets musicaux loufoques sous des pseudonymes… J’adorerais ça ! J’ai envie d’explorer les sonorités de l’hyperpop… Collaborer avec quelqu’un comme A. G. Cook, ce serait vraiment incroyable ! C’est une musique rebelle et dans laquelle j’ai trouvé un vrai safe space pour les personnes queers. La niche musicale la plus stylée de tous les temps !

Le cinéma, ça pourrait être rigolo. Je voudrais faire quelque chose de surprenant pour le public, et pour moi aussi. On m’a déjà proposé des rôles mais je n’étais pas emballé. “Abdel travaille dans une épicerie de jour. La nuit, il enfile une paire de talons et fait le trottoir”. Eww, i’m not gonna do that. Si je dois incarner une personne queer au cinéma, il faut que cela se fasse avec les bonnes personnes, sur la base d’un script bien écrit. Mais “World’s Biggest Popstar” reste quand même mon objectif numéro un. (Rire.)

Quand tu regardes le monde, qu’est-ce que tu vois ?

C’est difficile de se projeter aujourd’hui. Encore plus d’être optimiste, mais on va essayer de l’être. Ce que je trouve de beau, c’est que l’on a, plus que jamais, accès à la parole. Tu peux défendre un propos, exister et être entendu même si tu n’es personne, et même si cela ne dure qu’un instant. Malheureusement, c’est à double tranchant. La fausse expertise fait peur, la suropinion aussi parfois. C’est difficile de savoir si l’on est une bonne personne aujourd’hui. Mais c’est un défi intéressant auquel l’humanité avait besoin d’être confrontée. Mes inquiétudes se portent plus sur la santé mentale de notre génération. On ne nous a pas laissé le monde le plus stylé de la Terre. Ce qui m’inquiète, c’est que l’on cherche à éteindre la flamme de notre génération…

Je crois qu’on oublie aussi trop souvent d’être soudés lorsque l’on devrait l’être. J’ai beaucoup de mal à comprendre lorsque les insultes qui me visent viennent de personnes queers. Je n’essaie pas de force-feed mon œuvre ; ce n’est pas parce que tu es LGBTQIA+ que tu es obligé d’aimer ma musique… Mais je ne vois pas l’intérêt de jeter ta haine sur l’une des rares représentations visibles. J’espère voir plus d’unité et de solidarité dans un futur proche.

World’s Biggest Popstar” reste quand même mon objectif numéro un.

Bilal Hassani en MARRKNULL

Top MARRKNULL
Pantalon ICHIYO
Bracelets ZANA BAYNE

Bilal Hassani en Valentino

Pull & jupe VALENTINO
Escarpins CHRISTIAN LOUBOUTIN

“ALLÔ BILAL”

Les questions de fans à l’iconique Bilal.

Les fans : @IAMLAURAHASSANI  & DEBORAH_BRULIN_27102002

Quand reprendras-tu la route des concerts ?

On devrait reprendre l’an prochain. C’était compliqué de mettre en place des tournées ces derniers temps mais on prépare de belles choses pour 2022.

Quel message souhaites-tu faire passer à tes fans ?

Toujours le même : amour et positivité. Il ne faut jamais oublier qu’envoyer de bonnes énergies nous apporte de bonnes énergies. Au-delà de penser positif, il faut agir positif et faire du bien aux gens autour de nous.

Quelle est ta wig favorite ? Et pourquoi ?

Aujourd’hui, je pense que c’est Vénus. Le long blond vénitien que je portais pour le shooting NYLON. Je l’adore !

Ton prochain album sera-t-il exclusivement écrit en anglais ?

Je n’en suis pas encore sûr mais pour l’instant, tous les morceaux écrits l’ont été en anglais.

Quelles sont tes séries préférées ?

J’adore Mes Premières Fois sur Netflix. C’est une série incroyable de Mindy Kaling. Une tuerie : que ce soit en termes de représentation ou d’écriture, le développement des personnages est parfait. Un sans-faute. J’aime aussi beaucoup l’anime My Hero Academia. 

Dans quel film aurais-tu aimé tourner ?

J’aurai adoré tourner dans Le Cinquième Element de Luc Besson – j’adore ce film. Je me serais senti très bien là-dedans.

Avec qui voudrais-tu écrire un featuring ?

Je mentionne souvent Mariah Carey car c’est l’une des meilleures auteures au monde selon moi. Tout est incroyable dans ce qu’elle fait. J’adorerais faire une chanson R&B de 7 minutes avec elle.

Bilal Hassani en Valentino

Manteau LANVIN
Pull & jupe VALENTINO
Escarpins CHRISTIAN LOUBOUTIN

Journaliste : Thémis Belkhadra
Photographe et Vidéaste : Quentin Saunier
Assistant Photographe : Romain Boé

Styliste : Nicolas Dureau
1re Assistant Styliste : Merveille Malaki

2e Assistante Styliste : Léa Salaün

Maquilleur : Nicolas Denoun

Coiffeur : Alexis Parente
Manucuriste : Marie Rosa

Chien : Jjong Hassani
Production :Producing Love
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