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Oulaya Amamra : Reine de l’Arène

Entre Métamorphoses et Puissance Sauvage : Oulaya Amamra Dans l'Univers D'Emma Benestan

Photos: Rubis Jacobson

Pour Animale, son second long-métrage, Emma Benestan retrouve une nouvelle fois sa muse, Oulaya Amamra, pour un projet audacieux où elle nous immerge dans un western fantastique, sublimé par les paysages envoûtants de la Camargue. Entre métamorphoses mystiques et traques sauvages, le film brouille les frontières entre humanité et animalité, tout en interrogeant la place des femmes dans un univers dominé par la masculinité. Dans ce décor à la fois brut et poétique, Oulaya confirme son statut d’icône et rappelle pourquoi elle a décroché un César pour Divines.

Comment te sens-tu aujourd’hui, Oulaya ?
Waouh, comment je me sens aujourd’hui ? Tu veux très honnêtement ? Je sors tout juste d’une petite grippe, disons que je suis sur la pente montante. Mais c’est une vraie question, on ne se la pose jamais, c’est marrant.

Si c’est trop personnel, on peut parler d’autre chose, comme la promo, par exemple. C’est un exercice que tu apprécies ?
En fait, ça va, parce qu’on commence à avoir les retours des gens avec les projections. Et puis, avec Emma (Emma Benestan, réalisatrice du film Animale), c’est particulier. On se connaît depuis longtemps, c’est le troisième film que l’on  fait ensemble. C’est comme une petite famille, il y a beaucoup de bienveillance. C’est un film que j’adore, dont je suis très fière et j’ai vraiment envie qu’il soit vu.

Le sujet du film peut surprendre. Quand j’ai vu les premières images, j’ai tout de suite pensé au bien-être animal. Est-ce que tu pourrais expliquer la différence entre les courses camarguaises et la corrida traditionnelle ?
Bien sûr. Alors, la corrida implique une mise à mort de l’animal à la fin. Dans la course camarguaise, ce n’est pas du tout le cas. L’animal est honoré, presque mis à hauteur d’homme. C’est comme un ballet, les raseteurs courent au même niveau que le taureau, sans armes. Tout est dans le respect et la tradition. Les gens y vont en famille, c’est tout un monde !

Tu t’es posé la question en acceptant ce projet ?
Quand tu lis le scénario et vois le film, tu comprends à quel point mon personnage est connecté à ces animaux. C’est un film qui met à l’honneur le taureau, un animal majestueux, puissant et sensible. Ruben Impens (Alabama Monroe, Titane,…), le directeur de la photographie, l’a capturé magnifiquement.

 

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Quels messages aimerais-tu que le public retienne de ce film ?
Je ne sais pas si c’est bien de parler de messages, je préfère que chacun se fasse sa propre lecture. Mais avec Emma, on a beaucoup parlé de transformer la peur en rage, de dire qu’on ne se taira plus jamais. Si ce film peut aider ne serait-ce qu’une seule personne à se sentir moins seule, alors ça aura valu le coup.

Comment as-tu vécu l’expérience de tourner avec des taureaux et des acteurs non-professionnels ? Ce n’était pas facile, mais le taureau, en tant que partenaire de jeu, m’a beaucoup aidée. Parfois, on attendait des heures pour qu’il se passe quelque chose. Quand le taureau venait près de moi, à quelques mètres, tu sens son souffle, tu oublies les caméras. C’est juste deux êtres vivants qui se regardent, quelque chose de sacré. Avec les autres acteurs aussi, c’était très naturel. On dit qu’ils sont “non-professionnels”, mais je n’aime pas ce terme. Ils jouaient comme des acteurs confirmés, et ça apporte même beaucoup de réalisme au film.

Tu as eu des scènes où tu étais vraiment en face d’un taureau, très près. Comment ça s’est passé ? Tu as eu peur ?
J’ai eu super peur. En fait, c’était lors de la deuxième course. Je me souviens, il y a la contre-piste : à l’intérieur de la piste, il y a le taureau, puis une contre-piste avant la barrière qui te protège. J’étais dans une espèce de cage, mais… le taureau s’est approché. Il y avait le manadier à côté de moi — c’est le propriétaire des taureaux et de la ferme. Il m’a dit : « Ne bouge pas. » Moi, instinctivement, je voulais partir, mais il m’a répondu : « Non, laisse-toi faire. » Le taureau s’est approché, approché… Honnêtement, s’il m’avait donné un coup de corne, tout aurait pu se terminer là.

Il y a une phrase dans le film qui dit : « Si tu ne l’embêtes pas, il ne te fera rien. » Ça, tu l’as ressenti ?
Complètement. Franchement, ceux qui nous ont fait le plus de mal sur ce tournage, c’est les moustiques. Et ça, on n’en parle pas ! En Camargue, tu es une belle proie. Tu te fais littéralement manger, même avec un jean ou n’importe quoi. Ça m’a fait bien plus peur que le taureau. Finalement, on ne s’est jamais fait attaquer, mais il faut composer avec cet animal. Parfois, on était 40 sur le tournage à attendre. Moi, par exemple, j’ai trié les taureaux — quand tu tries, c’est à cheval : tu dois sélectionner les taureaux pour les courses, donc tu te retrouves au milieu de 10 à 15 taureaux. Toute l’équipe devait être silencieuse, car au moindre bruit, les taureaux partaient. Franchement, c’était mythologique, presque sacré.

 

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Mon personnage est connecté à ces animaux. C’est un film qui met à l’honneur le taureau, un animal majestueux, puissant et sensible.

Est-ce que tu as des points communs avec ton personnage ?
Oui, forcément. En vérité, c’est toujours toi le point de départ, au final, parce qu’il faut bien partir de quelqu’un. Cette fille, elle n’existe pas, donc ce n’est pas comme si je faisais un biopic. Là, il fallait l’inventer. Donc on est vraiment parti de qui je suis, de ma personnalité. Oui, il y a beaucoup de points communs. Mais je dis toujours qu’un film te prend quelque chose et te donne quelque chose. Tu ne peux pas passer par tout ce qu’elle traverse sans en ressortir changé, même si je ne suis pas elle. C’est moi qui ai vécu ces moments à travers elle, donc ça laisse des traces. Maintenant, je me dis : « Non, je ne me laisserai plus faire. » C’est fou comme le cinéma peut te transformer, même mentalement.

Ton personnage est inspiré de Marie Segrétier. J’ai regardé son Instagram, elle est super badass et inspirante. Est-ce que tu peux nous raconter comment s’est passée votre rencontre ?
Ah oui, Marie, je l’adore. Elle est incroyable. Emma avait déjà travaillé avec elle sur un moyen-métrage, un docu-fiction où elle la filmait dans son quotidien. Marie évolue dans un milieu très masculin, et cela n’a pas été simple pour elle de s’imposer au début. Je l’ai rencontrée grâce à Emma, elle était super impliquée. Elle assistait à tous mes entraînements, c’était même ma doublure. Elle est vraiment badass : elle dit tout ce qu’elle pense et ne se laisse pas marcher sur les pieds. Pourtant, elle a dû affronter beaucoup de critiques et de moqueries au début, surtout de la part des hommes. Comme dans le film, il faut toujours prouver ta légitimité quand tu es une femme dans un milieu dominé par eux. Mais aujourd’hui, elle est immensément respectée. Elle a su faire taire ceux qui doutaient d’elle et ça force l’admiration.

Même dans les costumes, on sent son influence. Il y a un look très codifié.
Oui, tout à fait. Là-bas, ils portent beaucoup les chemises camarguaises. C’est un vrai uniforme, presque un symbole. Mais attention, ça coûte une blinde ! Une chemise peut coûter entre 150 et 200 euros. Moi, je commence à en avoir une petite collection, mais c’est vrai que c’est cher. Quand tu vas voir une course, il faut absolument porter cette chemise !

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Avec Emma, on a beaucoup parlé de transformer la peur en rage, de dire qu’on ne se taira plus jamais. Si ce film peut aider ne serait-ce qu’une seule personne à se sentir moins seule, alors ça aura valu le coup.

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Est-ce que tu as une scène préférée, une scène que tu as aimé tourner ou qui t’a marquée ?
J’ai adoré la scène de la fête… Ils ont leur chant, « La vache, la vache, quelle pute cette… ». On a beaucoup rigolé, je t’avoue, à la fin, je pense que je n’avais plus d’oreilles, mais ils sont tellement généreux, gentils, drôles, festifs. Tu sais, quand tu vas dans leurs soirées, comme dans la scène qu’on a tournée, même si tu n’es pas de là-bas, tu ne peux pas rester à l’écart. Ils te mettent dans l’ambiance, ils te font tourner, ils te font danser.

Au délà de ça je trouve que c’est intéressant qu’Emma ait choisi des mecs aussi touchants. Je me rappelle du casting qu’on a fait avec tous les raseteurs. C’était très difficile, parce que le sujet du film est assez difficile et ce n’est pas facile pour des mecs du Sud, où les traditions sont très ancrées. Ils ne sont pas machos, au contraire Ils disaient : « Non, mais nous, on peut pas jouer ça, parce qu’on respecte trop les femmes, on peut pas être vus comme ça, on ferait jamais ça. » En même temps, c’est intéressant d’avoir pris des mecs qui ne sont pas des méchants, ni des caricatures de ce qu’on pourrait imaginer.

On va parler du genre fantastique en France… On pense forcément à Le Règne animal, à Titane, à La Nuée ou à Ogre. Qu’est-ce que tu penses que la France peut apporter à ce genre au cinéma ?
En France, il n’y en avait pas beaucoup, comme tu dis. Enfin, si, il y en a eu avant. Par exemple, j’avais vu La Féline. Tu vois, ces films un peu sur la transformation, la métamorphose. Là, je pense à The Substance. Tu l’as vu ?

Non, pas encore.
Ah, tu ne l’as pas vu ?

J’ai eu peur d’avoir mal physiquement.
Ah ouais ? Mais tu verras, ça ne fait pas peur. C’est tellement drôle parce qu’elle se moque justement de ça, que tu prends du recul. Et je trouve qu’il n’y a rien de mieux pour dénoncer quelque chose, comme les abus ou le temps qui passe. Pour des sujets ancrés dans le réel, utiliser le fantastique, c’est impactant.

Quand on a travaillé sur le corps et cette intrusion, c’était tellement violent… Ton corps a mal, en fait. Je me souviens, Emma me disait : « Il faut que tu te tordes de douleur, que t’aies mal au ventre. J’ai envie de sentir que c’est dur. » C’était super dur à jouer. Ça m’a fait comprendre à quel point vivre ce traumatisme peut marquer un corps.

Dans le film, ça prend du temps : il faut 1h20 avant qu’elle puisse dire ce qu’elle vit. Au début, son corps lui envoie tous les messages, mais elle est dans un déni où on lui répète : « Mais c’est rien, t’es forte. »

 

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Quand le taureau venait près de moi, tu sens son souffle, tu oublies les caméras. C’est juste deux êtres vivants qui se regardent, quelque chose de sacré.

Si toi, tu devais incarner un animal, tu choisirais lequel ?
Le taureau, franchement, c’était cool. Il symbolise la virilité. On nous a toujours présenté le taureau comme une figure de force – Red Bull, le taureau, tout ça. Quand on était petits, je ne sais pas si on te disait ça aussi, mais il y avait cette histoire de « couilles de taureau »… On disait qu’il existait une boisson à base de ça et que ça donnait de la force. C’était étrange, toutes ces idées autour de cet animal.

Mais en vrai, comme le disait Emma, les taureaux mangent juste de l’herbe. Ils sont inoffensifs tant qu’on ne les attaque pas. Ils dégagent plus de tristesse que de puissance.

Sinon, quel autre animal ?
Honnêtement, je sais pas… J’adore les tortues, mais je pense que je m’ennuierais, tu vois.

Pourquoi tu aimes autant les tortues ?
Parce que j’en avais une, qui malheureusement n’est plus là. Elle a vécu 25 ans.

Elle s’appelait comment ?
Élodie.

C’est adorable.
Oui. On allait au lac, on se baladait… Les gens se moquaient un peu de moi.

Pour toi, la part animale en nous, c’est une force ou une faiblesse ?
C’est une force. On devrait être beaucoup plus à l’écoute de cette part animale. Sans ce côté animal, mon personnage resterait dans le déni, à écouter les humains qui lui disent qu’elle est forte et qu’elle doit continuer comme ça. Mais son côté animal lui dit : « Non, maintenant, t’as une force. » Et cette force se transforme en rage.

 

Retrouvez Oulaya dès maintenant dans votre cinéma préféré pour découvrir Animale d’Emma Benestan.

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Interview : Nicolas DUREAU @nicolasdureau
Photographe : Rubis JACOBSON @rubisjacobson

Stylistes : Mehdi BAKHTI @mehdibkt_
Maquillage : Khela @khelainparis
Cheveux : Mélissa NEROVIQUE @melissa_nerovique

Assistant Photographe : Aurore BARRET @aurorandyou
Assistante Styliste : india IFRAH @india.ifh
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