Mon Compte Shop
Musique

Lucky Love : l’amour au corps

Après avoir bousculé les normes de l’industrie de la mode, Lucky Love veut désormais être entendu et vu tel qu’il est : “J’en ai marre que l’on me fantasme, je veux que l’on me regarde.”

Photographe : Rayan NOHRA avec Polaroid
Styliste : Nikita VLASSENKO
Maquilleuse : Rika BITTON
Coiffeur : Simon CHOSSIER

Photographié avec l’appareil photo instantané SX-70 – Lunettes, Veste et Pantalon GUCCI

Ah, comme il est bon d’apprendre à aimer sans attendre… Il y a quelques semaines, Lucky Love s’était livré sans crainte en publiant TENDRESSE, un premier EP énigmatique et sensuel dans lequel il déclarait sa flamme à l’amour en personne. Une mise à nu soudaine de la part de celui qui, pendant des années, avait d’abord mis son corps et son esprit au service des autres. Dans les pages glacées des magazines, sur les podiums illuminés, puis dans l’enceinte secrète des cabarets… Partout, la même lumière pour immortaliser ses abandons créatifs et le guider jusqu’à son propre éclat.

Quand on porte sur son dos le bagage du marginal, le chemin n’est jamais de tout repos – Lucky s’en souvient. Ces dix dernières années, le garçon a travaillé d’arrache-pied pour s’imposer aux yeux du monde. Sous le regard des plus grands photographes, chorégraphes et dramaturges, à chaque pose, il soulignait un peu plus son propos premier : ce que la société voyait comme un handicap n’était que la traduction physique de sa prédestination. Ce petit truc en plus qui fait que la Vénus de Milo fascinera toujours autant. Alors, Lucky Love serait-il une Vénus des temps modernes ? 

En visite au studio de NYLON France pour promouvoir la réédition de TENDRESSE qui sort le 13 juin, il n’a pas pu s’empêcher de… me parler d’amour. Ce besoin adolescent de combler le vide ; le fantasme que nous représentons parfois pour l’autre ; cette réticence que nous avons à nous livrer ; et l’espoir de guérir un jour de tous ces maux en tenant la main de quelqu’un d’autre. La vie n’est pas toujours tendre avec celles et ceux qui aiment : on rit, on pleure, on touche le ciel avant de se perdre. Mais on finit toujours par trouver la force de se relever, en cherchant la tendresse à l’intérieur. Avec le titre “Now I Don’t Need Your Love”, c’est précisément ce à quoi s’adonne Lucky Love : s’offrir tout entier à lui-même.

Photographié avec l’appareil photo instantané Polaroid Now+ Génération 2 – Lunettes et Veste GUCCI

Photographié avec l’appareil photo instantané Polaroid Now+ Génération 2 – Lunettes et Veste GUCCI

La réédition de ton EP comporte une chanson inédite dont le propos tranche avec sa “tendresse”. Aujourd’hui, tu n’as vraiment plus besoin d’amour ?

Un soir, l’hiver dernier, j’étais à Berlin dans mon lit quand mon producteur Paco [Del Rosso] m’a envoyé cette instru. Il était 2 heures du matin, je me suis mis à danser dans mon salon comme un ouf et le hook est apparu : “Now I don’t need your love.” Comme tu l’as souligné, l’amour a toujours fait partie intégrante de mon travail mais je n’avais encore jamais parlé de l’amour que l’on se porte à soi. C’est un peu une façon de dire : allez vous faire foutre ! Je crois que j’ai toujours eu besoin d’être validé et j’en ai ras le bol. En ce moment, je suis enfin prêt à regarder ce que je me fais subir : toute cette pression que j’attribuais aux autres et qui venait en fait de moi. Le message s’adresse à moi-même ainsi qu’aux gens qui m’ont jugé, celles et ceux qui n’ont pas su m’aimer. En fait, j’avais besoin de me réapproprier mon amour.

Le disque comprend aussi des versions live de tes précédents singles. Pourquoi cette démarche ?

Lorsque j’ai vu les images de cette session à Montreux, j’ai tout de suite eu envie d’en faire quelque chose de plus concret. “Now I Don’t Need Your Love” est une chanson faite pour la scène donc ça semblait logique de rééditer l’EP en version live. Jusqu’aujourd’hui, j’ai toujours décoré de mes sorties en clippant chaque single, mais cette fois, j’avais envie d’y aller à l’instinct. On ne peut pas tricher avec le live.

Tes premiers concerts se sont d’ailleurs déroulés sur la scène de l’Olympia. Pas trop de pression ? 

En vérité, la pression venait surtout du fait que Juliette [Armanet] et Marina [Rollman] sont deux artistes que j’aime. Ce sont des amies que je ne voulais surtout pas décevoir.

Il se passe quoi en toi lorsque tu entres sur scène ?

J’ai appris le métier au théâtre et chez Madame Arthur, donc j’avais l’habitude d’un certain contrôle sur scène : ce que j’ai dû apprendre, c’est justement à lâcher prise. Tout défaire pour m’autoriser à être là, dans le moment présent. Lorsque tu assistes à un spectacle, tu as parfois l’impression que ça dure des heures mais pour nous, c’est un claquement de doigts, une étoile filante. Je veux pouvoir profiter de chaque seconde, et être moins égoïste, car je réalise la chance qui m’est donnée. J’aimerais délivrer des performances qui ne perdent jamais en intensité. Je ne veux plus être parfait : je veux être moi-même. 

C’est pour cette raison que tu as composé “Toutes mes vérités” ? 

En grand amoureux que je suis, j’ai toujours eu tendance à donner ma confiance facilement, et j’ai souffert de la donner à n’importe qui. Quand tu offres ta vulnérabilité à l’autre et qu’il ou elle la piétine, c’est compliqué d’apprendre à faire confiance à nouveau. “Toutes mes vérités” parle d’un endroit de confort. On n’aime pas trop ça en amour, le confort : c’est anti-sexy. Sauf que ce n’est que dans ce confort que je peux me révéler à l’autre. Quand on est amoureux.se, il faut savoir faire ce saut-là. 

Photographié avec l’appareil photo instantané SX-70 – Haut ACNE STUDIOS

Quelles sont les qualités d’un.e bon.ne amant.e ?

La bienveillance, la franchise, la vérité… J’ai l’impression qu’en couple, on a tellement peur de ne plus plaire à l’autre que l’on s’obstine à correspondre au fantasme du début de relation. En grandissant, j’aspire à un autre type de relation. Sans vérité, on aime un mirage et j’ai plutôt envie de tomber amoureux d’un être humain.

Cela fait déjà quelque temps que tu évolues dans la lumière. De quelle façon cela a-t-il impacté tes relations amoureuses ?

En fait, c’est la seule chose qui me fait peur dans la notoriété. J’en ai marre que l’on me fantasme, je veux que l’on me regarde. Ce dont j’ai besoin aujourd’hui, c’est de quelqu’un qui me regarde et m’aime pour ce que je suis. Pas pour ce que toutes ces industries ont fait de moi.

J’imagine que tu parles de tes années dans la mode… Qu’est-ce qui change maintenant que tu fais de la musique ? 

Auparavant, on utilisait mon image mais aujourd’hui, elle ne sert plus que moi. Je n’ai pas envie de répéter les erreurs que j’ai faites dans l’industrie de la mode, comme dire oui à tout. Ce qui m’intéresse, ce n’est pas de plaire à tout le monde mais de faire entendre mon message. J’en avais assez que mon enveloppe corporelle soit un obstacle entre les autres et moi. Bras ou pas bras, gay ou pas gay : je fais partie de ce monde. Je ne veux pas vivre sur un piédestal, isolé. Le vrai travail, ça a été ça : ne plus faire de concessions pour montrer qui est Lucky Love. 

De quoi rêvais-tu plus jeune ? 

Je rêvais de gloire, d’expression, de ne jamais travailler… Et surtout d’amour ! Tout n’est que le fruit de ce besoin d’amour.

Te souviens-tu de ton arrivée à Paris ? 

Je suis arrivé à Paris en sortant de désintox, donc j’étais fragilisé mais je me sentais prêt. J’ai eu la chance d’arriver amoureux, et je conseille à quiconque souhaitant s’installer ici de ne pas venir seul.e. Je décris Paris comme toutes les grandes villes : un endroit où chaque verre est peut-être un rêve qui va se réaliser. En arrivant ici, j’avais pour la première fois l’impression de ne plus être entre quatre murs.

Comment on s’impose dans une grande ville comme celle-ci ?

Le plus important, c’est de rester humble et intègre. C’est ce qui permet de ne pas perdre pied. Reste droit dans tes baskets et rêve très grand. Si tu rêves petit, tu auras toujours moins que ton rêve. Ne lâche rien et ne laisse personne te dire que tu n’as pas ta place.

Photographié avec l’appareil photo instantané Polaroid Now+ Génération 2 – Total look BALMAIN

Photographié avec l’appareil photo instantané SX-70 – Total look BALMAIN

Outre l’amour, la spiritualité occupe une place centrale dans ton univers. D’où te vient cette fascination ?

J’ai eu une éducation religieuse assez complète : catéchisme, retraites en silence chez les dominicains à 14 ans… Ma mère a beaucoup insisté sur tout ça. Ce qui m’a toujours fasciné, c’est l’imagerie. Dans les textes, je vois les filets d’un garde-fou, d’une politique des valeurs. En revanche, les vitraux des églises ont bercé mon enfance. C’étaient mes premiers rêves : quelque chose de si beau que je ne pouvais qu’y croire. Quand j’ai fait des études d’art, j’ai étudié la Renaissance italienne. Ce moment d’anthropocentrisme m’a beaucoup plu car Dieu n’était plus au centre des choses. Ce qui m’intéresse, c’est le sacré dans l’humanité. On a tendance à croire que le paradis est lointain mais pour ma part, je crois que nous sommes ce qu’il y a de plus sacré sur cette Terre.

voir l'article
voir l'article
Musique

Lucky Love : l’amour au corps

Se Connecter

Mot de pass oublié ?

Nouveau mot de passe

S'Inscrire* Champs obligatoir

FermerFermer