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LOTR, GOT : heroic fantasy et mixité sociale

Avec le retour du Seigneur des anneaux et de Game of Thrones sur nos écrans, la diversité fait enfin son entrée chez les Elfes, les Nains et à la cour de Port-Réal. Mais les efforts pour rendre l’imaginaire plus inclusif se heurtent à la résistance d’une partie du public.

Perso, j’ai toujours adoré la trilogie du Seigneur des anneaux. Ses destins liés et toute cette poésie : un conte fascinant. Certain.e.s de mes ami.e.s, en revanche, peinaient à y déceler la même beauté… Comment leur en vouloir ? Au sein d’un univers aussi vaste, les Hobbits, Elfes et chevaliers du Gondor arboraient tristement tous.tes les mêmes attributs physiques – excluant de fait une bonne partie de l’humanité.

En matant le premier épisode des Anneaux de pouvoir, c’est ce qui m’a captivé en premier. Pas les costumes ni les effets spéciaux, mais l’envie de faire entrer la diversité en Terre du Milieu. D’abord par la place centrale accordée aux personnages féminins, puis avec l’apparition d’Arondir – premier Elfe non-blanc ever, incarné par Ismael Cruz Córdova. Plus tard, la rencontre de Disa – une princesse naine – et celle de Marigold Brandyfoot – la belle-mère de Nori – confirme la volonté des showrunners de rompre avec une partie de l’héritage de Tolkien. 

 

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PROBLEMATIC FANTASY ?

Evidemment, ce genre de progrès – si petit soit-il – n’est pas du goût de tous.tes. Tu te souviens encore sûrement de la colère provoquée par le casting de Nora Dumezweni en tant qu’Hermione Granger dans la pièce de théâtre Harry Potter and the Cursed Child en 2016, ou plus récemment celui de Halle Bailey dans le rôle de la Petite Sirène… À chaque fois, les mêmes nous chantent leur vieille chanson.

Dès la diffusion du premier épisode de House of the Dragon, l’acteur Steve Toussaint a évidemment subi les mêmes attaques. Dans le rôle de Corlys Velaryon – mari d’une princesse Targaryen présenté comme l’homme le plus riche de Westeros –, sa peau noire associée à son haut rang semblait perturber une partie du public. Aux haters, l’acteur a répondu, moqueur : “On dirait que certains ont vraiment du mal à l’avaler. Des dragons, des yeux violets et des cheveux blancs, ça ne les gêne pas. Mais un mec noir et riche ? C’est au-delà de ce qu’ils peuvent supporter !

Cible des mêmes tentatives de gatekeeping, l’équipe du spin-off du Seigneur des anneaux a brisé le silence le 8 septembre : “Tolkien a créé un monde multiculturel par définition. […] Les personnes de couleur ont leur place en Terre du Milieu et sont là pour rester.” Une déclaration inspirante à relativiser, car l’œuvre de Tolkien a, comme l’explique la spécialiste Helen Young de tout temps attiré les racistes et suprémacistes blancs (même s’il était profondément antinazi), à cause de “la combinaison de stéréotypes raciaux et de hiérarchie raciale” dans son œuvre, reflet de la vision du monde étriquée de l’époque – les années 20-30. “L’imagination de Tolkien était vaste et variée, mais elle avait aussi ses limites”, écrit-elle. 

Pour le médiéviste Paul B. Sturtevant, l’usage du terme “race” dans son œuvre serait en fait le “péché originel” de l’heroic fantasy : “Tolkien confond race, culture et compétence. Il dit que les Hobbits, en tant que race, se reconnaissent dans une combinaison de traits héréditaires et de pratiques culturelles qui les rendent plus dégourdis que d’autres. Les auteurs contemporains doivent se libérer de cette idée.” Il faut dire aussi que la version cinéma de Peter Jackson n’a pas aidé avec son casting désespérément monochrome – le seul Noir, Lawrence Makoare, récupérant le rôle de Lurtz, l’affreux boss des Orques…

“NOUS SOMMES LÀ MAINTENANT”

Dans son livre The Dark Fantastic: Race and the Imagination from Harry Potter to the Hunger Games publié en 2019, l’auteure Ebony Elizabeth Thomas s’interrogeait sur les conséquences du manque de représentation dans les œuvres de fiction : “En ayant grandi après la libération des droits civiques, mon imaginaire restait encore ségrégué. […] Les livres et les films qui adressaient les plaisirs du rêve et de l’évasion ne parlaient pas de gens comme moi.”

Aujourd’hui, l’heure serait-elle au changement ? “Nous sommes là maintenant”, affirmait cette semaine l’interprète d’Arondir, Ismael Cruz Córdova. “Il n’y aura plus un jour où l’on pourra dire que les Elfes, et autres peuples de la Terre du Milieu, ne ressemblent pas à ceci ou cela. Ce chapitre est définitivement scellé.” Tyroe Muhafidin – qui campe le rôle de Theo – s’est, lui, réjoui d’avoir enfin pu rejoindre une telle production : “J’avais l’habitude qu’on me refuse ce genre de rôle. […] J’espère que [mon casting] pourra encourager d’autres jeunes à ne rien lâcher.” 

Heureusement, pendant que certain.e.s restent bloqué.e.s sur de vieilles histoires, d’autres s’attachent à en écrire de nouvelles. C’est le cas de l’auteur jamaïcain Marlon James avec son Black Leopard, Red Wolfpremier volet d’une trilogie fantastique se déroulant sur le continent africain. Dans une interview, celui-ci déclarait : “Je n’attaque pas le Seigneur des anneaux – je suis profondément influencé par Tolkien –, mais la plupart des histoires fantastiques partagent ces éléments : le héros et le chevalier, la vertu est récompensée, le mal facile à détecter. […] Mes recherches sur la culture africaine, ses religions, sa mythologie et son folklore m’ont aidé à me libérer de cette lecture judéo-chrétienne de l’heroic fantasy.”

Bonne nouvelle : alors que le deuxième tome vient d’être publié, Warner Bros a annoncé en avoir acquis les droits pour une adaptation pilotée par Michael B. Jordan et son Outlier Society. Il était temps…

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