Mai rime avec Festival de Cannes, mais cette année, l’organisation frappe fort : tenues trop dénudées ou volumineuses interdites. Une décision qui pourrait cacher bien plus.
Ce mardi 13 mai marque l’ouverture de la 78e cérémonie du Festival de Cannes, qui se déroulera jusqu’au 24 mai 2025. A cette occasion, une pluie de stars est attendue sur le tapis rouge pour nous présenter leurs tenues les plus extravagantes, sexy, glamour ou presque. A quelques heures de l’ouverture du festival, l’organisation a décidé “pour des raisons de décence”, d’interdire la nudité et les robes “trop volumineuses”. Cette interdiction soudaine, cacherait-elle en réalité tout autre chose ?
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Chaque année, c’est l’événement de la French Riviera : le festival de Cannes. Cette année, il fait son grand retour et celui-ci se déroulera du 13 au 24 mai 2025. Au programme pendant une dizaine de jours, la cérémonie d’ouverture comme toujours, la remise de la Palme d’or qui cette année sera attribuée à Robert de Niro, la projection de films en avant-première… Sans oublier la fameuse montée des marches sur le tapis rouge du Palais du festival où acteurs, réalisateurs, producteurs, équipes techniques et célébrités internationales se prêtent à la pose devant des photographes et un public du monde entier.
C’est à ce moment précis que tous les projecteurs sont braqués sur les stars et que la médiatisation de l’événement est la plus forte. C’est également à ce moment qu’elles nous dévoilent leurs tenues toujours très attendues. Traditionnellement, dans le dress code du festival, un smoking noir ou bleu marine était demandé pour les hommes et une robe longue, à cocktail, ou une robe courte était demandé pour les femmes. Cependant, des années 60 à nos jours, certaines célébrités dérogent à cette conformité vestimentaire, une habitude qui s’accentue ces dernières années. Aujourd’hui, le Festival de Cannes est devenu le théâtre de l’insubordination vestimentaire. On pense par exemple, en 2024, l’acteur espagnol Manu Rios vêtu d’un chemisier blanc decolleté Saint Laurent, ou encore aux mannequins Kendall Jenner, Naomi Campbell et Ngoc Trinh, toute venue avec des robes transparentes ou dénudées.
Autre phénomène marquant de ces dernières années : la portée politique et sociétale des tenues et des gestes de celles et ceux qui défilent sur le tapis rouge. Car au cœur du Festival, le tapis rouge ne se limite plus à la mode : il s’est transformé, avec le temps, en un véritable espace de représentation politique, où s’exprime une parole muette mais percutante. Si certain(e)s comptaient faire passer un message cette année, cela pourrait être compromis.
La nudité et les robes “trop volumineuses” désormais bannies du Festival
L’information est tombée la veille de la cérémonie d’ouverture, ce lundi 12 mai. Dans une mise à jour de la charte du festivalier, celle-ci stipule : « Pour des raisons de décence, la nudité est interdite sur le Tapis rouge, ainsi que dans tout autre lieu du Festival. »
Ces nouvelles règles, destinées aux femmes, devraient ravir celles qui avaient prévu leur tenue depuis des mois ! Cette décision fait suite aux nombreuses robes en dévoilant un peu trop sur le tapis rouge ces dernières années, ce qui pourrait heurter la sensibilité de certaines personnes. Tout comme les tenues et les gestes trop politiques ou trop engagés. Le Festival de Cannes souhaiterait peut-être maintenir une certaine neutralité sur les Marches, et que tout le monde s’habille de façon similaire ? De nombreux articles ont mis en avant la mannequin Bella Hadid avec ses robes laissant entrevoir ses seins dans une robe transparente Saint Laurent en 2024 ou encore dans une robe rouge avec une fente très haute et sexy laissant voir l’entièreté de sa jambe, signée, Alexandre Vauthier en 2016.
L’année dernière, Cate Blanchett faisait sensation avec une robe noire et blanche signée Jean-Paul Gaultier. Mais c’est lorsqu’elle tournait sur elle-même la doublure verte de sa robe dévoilée faisant un clin d’œil subtil aux couleurs du drapeau palestinien, avec la couleur du tapis rouge. Un geste muet, mais éloquent. La même année, Judith Godrèche et l’équipe de son film Moi aussi montaient les marches main sur la bouche, dénonçant les violences sexuelles systémiques dans l’industrie du cinéma. C’est ce que son film dénonçait. Dix ans plus tôt, en 2014, l’actrice mexicano-américano-libanaise, Salma Hayek Pinault, en robe bustier rose Saint Laurent, avait brandi une pancarte #BringBackOurGirls, en soutien aux lycéennes nigérianes enlevées par le groupe terroriste Boko Haram.
La mannequin somalo-norvégienne Rawdah Mohamed avait aussi fait une apparition remarquée en étant l’une des premières (si ce n’est la première) femmes en hijab à monter les Marches du Palais du Festival. A l’occasion, elle était vêtue d’une robe bleu clair Cheney Chan qui ressemblait à une sorte de coquillage tout droit sorti de la mer, avec un volume relativement raisonnable. Aujourd’hui, venir avec une tenue de cette envergure n’est plus possible et pour cause :
« Les tenues, en particulier les traînes longues, dont le volume entrave la bonne circulation des invités et complique l’assise dans la salle, ne sont pas autorisées.»
Plus de robes trop bouffantes et trop longues à la Aishwarya Rai en 2024 ou en 2017. Être le moins extravagant possible est désormais de vigueur à Cannes. L’explosion artistique doit à présent rester à sa place et mesurer ce qu’elle fait. Plus de sobriété voyons, sinon : « Les équipes d’accueil du Festival se verront contraintes d’interdire l’accès aux Marches aux personnes qui ne respecteraient pas ces règles. » Gare à vos fesses !
Pourquoi cette décision pourrait être conservatrice et ringarde en 2025 ?
Le corps et en particulier celui de la femme est un moyen d’expression artistique depuis bien des siècles. Au cours des précédentes décennies, ces dernières se sont battues pour porter ce qu’elles voulaient quand et où elles le voulaient. Pourquoi devrions-nous revenir en arrière ? La nudité est présente partout dans la mode en ce moment, comme on a pu le voir dans les dernières éditions des Fashion Week chez Saint Laurent, Mugler ou encore Coperni. Le tapis rouge est historiquement un lieu de créativité, d’identité visuelle et de prise de parole silencieuse. Imposer des limites aussi précises où spécifiquement, il n’y aurait pas de nudité et de robes à traîne trop longues revient à restreindre des formes d’expression artistiques et individuelles qui font partie intégrante de l’ADN du Festival, malgré lui. En censurant cette forme d’expression, le Festival envoie un signal de repli, à rebours d’un monde où l’émancipation corporelle est centrale dans de nombreuses luttes. Ce type d’interdiction pourrait être vu comme un retour à une forme de moralisation du corps féminin (et des corps marginalisés), là où l’art et la mode se veulent des terrains d’affirmation, de contestation et de liberté. En imposant une norme vestimentaire pudibonde, le Festival se contredirait lui-même, en choisissant de contrôler l’apparence plutôt que d’encourager la diversité des formes d’expression.
A contrario, porter une robe volumineuse dans une salle bondée représente un obstacle potentiel à la vue des autres invités ou spectateurs. Si la robe est très haute, cela peut obstruer la ligne de vision, en particulier dans des rangées serrées. Les invités derrière pourraient se retrouver à regarder une merveilleuse silhouette mais sans pouvoir pleinement profiter de la scène, des projections ou des interventions sur scène.
Alors, vous en pensez quoi ?
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