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Witchtok, spiritualité et sororité : la sorcière renaît

Loin des balais et autres chapeaux pointus, les sorcières renaissent en 2021 grâce à l’écho des réseaux sociaux. Poussées par une vague de féminisme et un besoin de spiritualité dans un monde patriarcal et ultra-industrialisé, ces femmes hors du commun reprennent – littéralement – leur pouvoir en main.

20,4 milliards. C’est le nombre total de vues que cumule le hashtag #WitchTok sur TikTok. Rassemblant une communauté internationale de sorcières, le réseau social a permis à de nombreuses jeunes filles de s’intéresser voire de pratiquer la sorcellerie.

En effet, alors que Sorcières – La puissance invaincue des femmes a battu tous les records depuis sa sortie en 2018 – et est encore best-seller aujourd’hui –, ces figures mystiques longtemps exclues de la société fascinent à présent le commun des mortels.

Symboles de défiance envers le patriarcat et d’une reprise de pouvoir dans un monde incontrôlable, les sorcières sont aujourd’hui des personnalités respectées et parfois adorées.

La magie des réseaux sociaux

En France, la fascination pour les witches est aussi de mise ! De l’indétrônable Sarah Al (@sarahal06) du haut de ses 1,3 million d’abonnés à Manon aka @little_witchyy que nous avons interviewée : c’est bien TikTok qui a été le plus gros tremplin pour ces sorcières. Du haut de ses 19 ans, Manon se lançait il y a un an et demi sur le réseau social. Le concept ? Suivre les trends du moment, et les adapter à la jeune sorcière qu’elle est. Sa première vidéo sur sa vie de baby witch a ainsi récolté plus de 200 000 vues et des dizaines de milliers de likes.

Comment a-t-elle commencé à pratiquer la sorcellerie ? Grâce à TikTok ! “Je ne pense pas que j’aurais eu ce déclic sans les réseaux sociaux, nous confie-t-elle. Avant, on n’en parlait pas. Pour moi, c’était des vieilles personnes qui avaient appris ça grâce à la précédente génération ; mais je ne voyais jamais des filles de 17-20 ans qui pratiquaient la sorcellerie.”

Sur Instagram, il existe également une importante communauté de sorcières. À grands coups de mantras et de feeds ultra-léchés, les witches du réseau social sont des influenceuses d’un nouveau genre. Tiffany Garrido (@tiffanygarrido_), 30 ans, est l’une d’entre elles. Formée au tarot de Marseille ou encore à l’astrologie, elle accompagne les femmes autour de ces sujets spirituels qui la passionnent. Des ressources dont elle aurait bien aimé disposer lors de ses débuts dans la sorcellerie quand elle avait 22 ans. “Je me sentais extrêmement seule et isolée. Les ressources qu’on me recommandait étaient vraiment très anciennes et je ne m’y retrouvais pas. Je ne voyais personne comme moi, moderne dans sa façon de vivre”, se souvient-elle. Aujourd’hui, elle cumule 14 000 abonnés sur son compte et s’est trouvé de véritables “copines et alliées” sur les réseaux. Une communauté solide qui lui a permis de créer une sororité nommée le Cercle des sorcières.

@little_witchyy Avouez on est toutes comme ça!😜🧚🏻 Pas vrai @sarahal06?💖 #foryou #babywitch #wiccan #sorcellerie #sorciere #witch ♬ wow this blew up – jacob

Tiffany par Emilie Blanc

De sorcières à sœurs 

Le Cercle des sorcières est une école un peu particulière… Accessible en ligne, cette entreprise créée par Tiffany propose des cercles de lune en Zoom. “Au début, on pouvait être 15, puis, après les confinements, on était trois fois plus !, témoigne-t-elle. Il y a eu une demande car toutes les femmes avaient la possibilité de faire une pause dans leur quotidien effréné, de prendre du temps pour elles, d’être à l’écoute, de se relier à d’autres femmes…”

Selon elle, cette sororité est une des raisons principales pour laquelle les femmes se prennent de passion pour la sorcellerie. “Il y a cette envie de se retrouver entre femmes. C’est quelque chose qui, dans les traditions, est extrêmement inné, respecté et sacré. On se retrouvait très facilement dans une tribu entre femmes pendant nos règles. On apprenait beaucoup entre femmes. Ces transmissions-là se sont perdues avec le temps. Et j’ai l’impression qu’il y a eu, à un moment donné, ce besoin de se détacher de l’énergie masculine et du patriarcat qui nous écrase. Il y a une véritable envie de rééquilibrer avec une énergie féminine plus douce, dans l’écoute, l’intuition.”

Les mouvements féministes de plus en plus populaires brandissent d’ailleurs régulièrement cette figure de la sorcière comme un symbole de pouvoir contre l’oppression masculine. “Il y a en effet ce côté girl power et de reprise du pouvoir chez la sorcière”, nous explique Manon. “Moi qui étais timide, j’ai pu vraiment me renforcer et accepter qui j’étais !”

Une prise de pouvoir spirituelle

À seulement 26 ans, Sidonie (@sorciere_box) a déjà monté son autoentreprise. Le concept ? La “sorcière box” ! Chaque mois, elle envoie à ses abonnés deux produits – une pierre, une plante – et un DIY. “En anglais, sorcellerie se traduit par witchcraft, un terme qui fait vraiment le lien avec l’artisanat. Quand tu es une sorcière, tu fais tout toi-même : il faut mettre la main à la pâte ! Je voulais vraiment que ma box ait un petit côté Poudlard.” Une innovation destinée autant aux expertes qu’aux débutantes qui lui permet de vivre de sa passion.

Pour Sidonie, cet engouement pour la sorcellerie n’est pas surprenant. “Le côté spirituel, le côté écologie… On vit dans une société à 350 000 à l’heure, on est nombreux à vivre en ville… La sorcière, elle, travaille 100 % avec la nature : les plantes, les éléments, les cycles lunaires, les astres… Des choses qui sont là depuis la nuit des temps et qui seront là bien après nous. On a poussé le truc tellement loin dans l’industrialisation qu’à un moment, ce n’est plus possible. Naturellement, on est obligées de retourner à nos sources les plus profondes pour se connecter à la Terre et à nos ancêtres.”

Pour Manon, la sorcellerie lui a aussi permis de se détacher d’une société “trop dans les codes”. “Ça m’a donné une autre vision du monde. J’ai découvert plein de choses et réussi à me connecter avec les éléments, les esprits de la nature.” Dotées d’une grande sensibilité, les sorcières ont pourtant longtemps été assignées à la figure de la femme mauvaise et fan de magie noire. Ce week-end, nos sorcières célèbrent elles aussi Halloween, l’occasion de déconstruire les clichés autour de cet événement pour le moins dénaturé de ses origines.

D’Halloween à Charmed : déconstruire le mythe de la sorcière

La sorcière : un monstre sans cœur tout juste bon à devenir un déguisement pour Halloween ? Oubliez ces idées reçues. Pour de nombreuses femmes, cette fête devenue ultra-commerciale est une célébration à prendre très au sérieux.

“Il existe huit sabbats – passages de saison ritualisés – que célèbrent les sorcières dans l’année”, nous détaille Tiffany. “Le 31 octobre, c’est le sabbat de Samhain. On se trouve entre l’équinoxe d’automne et le solstice d’hiver. Cette célébration a été transformée et réinterprétée pour devenir la fête Halloween. Chez les sorcières, c’est un moment où le monde des vivants et celui des morts sont très proches. C’est un peu notre nouvel an à nous !”

Si Tiffany proposera un rituel collectif en ligne pour “se relier ensemble entre femmes”, pour Sidonie, ce sabbat représente plus une “période d’introspection”. “Beaucoup font un coven, mais moi, je suis très pudique par rapport à ça”, avoue-t-elle. Quant à Manon, qui célébrera aussi les morts, elle avoue ne pas avoir particulièrement réfléchi à la question. “On le fête comme les autres au final ! Avec des choses simples : des gâteaux et un film d’Halloween !”

De quoi abattre les clichés sur la sorcière qui jette des sorts avec sa baguette magique la nuit du 31. D’ailleurs, nos sorcières Tiffany et Sidonie se sont vite détachées de ce personnage caricatural, grâce aux films et séries des années 90-2000. Pour Sidonie, c’est la saga Harry Potter qui l’a particulièrement touchée : “Je pense qu’on est nombreux dans notre génération à avoir la frustration qu’aucun hibou ne soit venu chez nous ! D’ailleurs, sur les réseaux sociaux, la ‘witch aesthetic’ s’inspire énormément de Poudlard même si, évidemment, ça n’a rien à voir avec la vraie vie de sorcière.”

Quant à Tiffany, c’est la série Charmed qui l’a profondément marquée. “J’avais mon livre des ombres, je jouais à des jeux de rôles avec mes voisines… Je me prenais pour une sœur Halliwell ! Et ça m’a beaucoup aidée à me construire en tant que sorcière car je m’identifiais à beaucoup de choses. Je fais partie d’une génération qui a grandi avec Charmed, Buffy, X-Files, soit les premières séries qui parlaient de choses mystiques. Avec des femmes, belles, normales, sympas et toujours cette notion de sororité.”

Des œuvres souvent sous-cotées qui ont forgé Tiffany en tant que sorcière et l’ont inscrite dans une démarche féministe. “On est toutes des sorcières en soi. C’est Starhawk qui disait, dans les grandes lignes : si je suis une femme, je suis une sorcière puisque, par essence, une sorcière est une femme qui assume le pouvoir-du-dedans, quelque chose à l’intérieur de nous et qui s’exprime à l’extérieur. Donc, à partir du moment où je crée ce que je crois, j’ai un pouvoir.”

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