Nicolas Di Felice fait poper Courrèges
Entre vestiaire campus et hédonisme, le directeur artistique de Courrèges te présente sa new collection et t’en dit plus sur son processus créatif, son parcours, avec en plus ses best advices !
Entre vestiaire campus et hédonisme, le directeur artistique de Courrèges te présente sa new collection et t’en dit plus sur son processus créatif, son parcours, avec en plus ses best advices !
C’est en allant découvrir sa pré-collection homme-femme printemps-été 2024 que la team NYLON est tombée sur the one and only Nicolas Di Felice. Celui qui a su faire renaître Courrèges de ses cendres te plonge dans ses inspis pour cette new co et répond à toutes tes interrogations. Du look créé pour Queen B à la place de la pop culture dans son travail en passant par ses meilleurs conseils pour travailler dans la mode : le créateur te dit tout !
Courrèges Men’s and Women’s Pre-Collection Spring/Summer 2024
Courrèges Men’s and Women’s Pre-Collection Spring/Summer 2024
Quel est le mood de cette nouvelle collection ?
C’est vraiment une histoire qui se construit, collection après collection. Je commence toujours de la fin d’une collection pour commencer la pré-collection d’après. Et je continue la pré-collection sur le show d’après. Donc là, je suis parti sur la fin du dernier show : il y avait de la lumière qui émanait des corps des filles et un côté un peu New Age. L’histoire, c’est un peu un road trip, à la recherche d’un certain hédonisme.
Quelle a été ton inspiration principale sur cette collection ?
Je suis retombé sur le film Zabriskie Point qui, pour moi, représente super bien cette histoire-là. Je ne l’avais pas regardé avant de commencer la collection mais c’est tombé in the process. J’avais déjà adoré quand j’étais plus jeune, je me suis dit “Ah, c’est vraiment ça”. Ça commence dans un campus avec justement un réveil d’étudiant.e.s qui se battent pour leur vision et pour leurs idéaux. Et arrive ce qui arrive : iels partent en exil et arrivent dans ce fameux désert super sec où iels se roulent tous.tes ensemble avec des scènes d’amour et de communion qui m’ont toujours parlé. Le line-up de cette collection s’articule de la même manière. On est donc sur du formal wear inspiré campus, on retrouve le lettering, le mini Oxford, du pinstripe…
On les voit partir, prendre l’avion – d’ailleurs l’avion est assez incroyable – et arriver dans le désert ; donc c’est vraiment la même histoire. A un moment, le line-up devient un petit peu plus ample : il y a beaucoup de coton, beaucoup de blancs, les mailles deviennent un peu plus ajourées, il y a du coton bio… Tout devient un petit peu plus confortable pour accueillir justement cette chaleur et ces rayons du soleil.
Et il y a un côté un petit peu hédoniste sur la fin. Il y a des accessoires avec des tranches d’agate avec un côté un peu ésotérique… Pour résumer, je dirais que c’est un voyage initiatique à la recherche de plus de liberté et d’hédonisme.
Est-ce qu’il y a une pièce ou un look dont tu es particulièrement fier ?
Ça fait trois ans que j’ai repris la maison et deux ans qu’on présente vraiment des collections homme. Avec l’homme, je fais vraiment ce que j’ai envie de porter et ce qu’on a envie de porter au studio. Donc on essaie vraiment les vêtements les uns sur les autres. Cette fois-ci, plus que jamais, j’ai envie de tout porter. S’il y a une pièce que j’adore, c’est le pantalon évasé avec les détails de protection et tous les zips. C’est une des pièces que j’attends avec impatience.
Courrèges Men’s and Women’s Pre-Collection Spring/Summer 2024
Courrèges Men’s and Women’s Pre-Collection Spring/Summer 2024
Quel regard portes-tu sur ton parcours depuis que tu es chez Courrèges et l’influence que la marque a aujourd’hui ?
Disons qu’il y a deux choses. D’un côté, je travaille tous les jours, c’est très prenant, donc je ne me pose pas souvent des questions. Je suis souvent au boulot, avec mes amis, même si, heureusement, j’ai aussi une vie à côté. (Rire.) Malgré tout, je suis quand même très concentré et c’est vrai qu’à chaque fois que je prends un peu de recul, je me rends compte : je vois beaucoup de gens porter la marque dans la rue, avec Insta on est tagué même au bout du monde, on va ouvrir une boutique en Corée, je reviens du Japon… Je me rends compte que ça parle à des gens même à l’autre bout du monde, et que ça a pris assez vite finalement. Même des chanteurs, des artistes que j’adore, portent du Courrèges.
Je pense qu’il y a un côté de moi qui ne s’en rend pas toujours compte. Je n’y pense pas tous les jours. Mais quand je me rends compte, je me dis que ouais, c’était super rapide, j’ai une super bonne étoile et que j’ai la chance d’avoir rencontré un public qui comprenait où je voulais aller, le message que je voulais passer.
En parlant d’artistes : qu’est-ce que ça t’a fait de voir Beyoncé porter du Courrèges sur son tour ?
J’adore Beyoncé. Je trouve que c’est vraiment une des plus grandes ambassadrices de cette “pop culture at large”. On a la chance d’habiller beaucoup d’artistes différent.e.s, que ce soit Beyoncé ou en France Shay, que j’adore et qui est devenue une amie. Ou des artistes plus underground comme des DJ qui sont un peu plus proches de mon monde – même si Beyoncé fait partie du monde de tout le monde.
J’étais super touché et surpris. On est dans une génération où on est beaucoup plus ami.e.s les un.e.s avec les autres entre DA. Je sais qu’on était beaucoup à avoir bossé dessus. On n’a pas une énorme structure. Donc j’ai accepté parce que la demande était pour des looks du show. It made sense, donc on l’a fait. Il y avait une variation de trois tenues avec le cercle au milieu – je pense qu’elle risque de porter la suite bientôt.
Mais on a fait le projet et puis voilà. J’avais oublié que c’était la première ce jour-là ! J’étais au théâtre et j’ai commencé à voir mon téléphone exploser et je me suis rendu compte qu’elle portait le look. Il y a tellement de gens talentueux qui ont bossé sur ses tenues. C’est flatteur et puis j’adore les tracks sur lesquels elle porte la tenue, donc c’est vraiment cool. Et on a vu directement les retombées pour le coup.
Courrèges Men’s and Women’s Pre-Collection Spring/Summer 2024
Courrèges Men’s and Women’s Pre-Collection Spring/Summer 2024
Tu prends en compte la pop culture dans ton travail ?
C’est une partie de mon travail assez inconsciente. C’est en moi. Je suis quelqu’un qui a grandi avec de la musique et qui travaille en musique, qui est aussi passionné par la musique que par la mode, qu’elle soit pop ou autre. Disons que mes premiers souvenirs de mode sont liés à la culture.
Je viens de la campagne belge, où l’on ne parlait pas de mode. J’ai eu accès à l’idée de ce que pouvait être la mode à travers MTV et les clips, je me suis rendu compte qu’on pouvait se créer des looks et créer une identité. Donc c’est vraiment en moi. Je dois avoir des automatismes mais j’ai très rarement un doc sur quelqu’un de pop dans mes recherches. Par contre, parfois, en faisant l’essayage, je me dis ouais, ça irait bien à telle personnalité. Ce n’est pas ma première pensée, mais ça doit être instinctif chez un garçon des années 80.
Quel est le meilleur conseil que tu pourrais donner à un.e jeune créateur.rice ?
La première chose, c’est de savoir que c’est de l’image, mais c’est avant tout des vêtements. Pour réussir et performer dans la mode sur le long run, il faut aimer le vêtement, et pas que l’image du vêtement. Donc ça passe par des connaissances et une certaine technicité. C’est comme quand tu veux être architecte.
A côté de ça, quelle que soit la pratique, je pense qu’il faut vraiment être soi-même, croire en soi, bien s’entourer de gens qui te rassurent et qui t’aiment pour qui tu es. Surtout qu’il y a tellement de gens qui veulent faire ça. Ça a l’air simple à dire, “Be yourself because everybody else is alrealdy taken”, mais je pense que c’est vraiment vrai. Quel que soit ton propos, si tu as quelque chose sur le cœur qui est vrai, les gens vont savoir que tu es sincère, et au-delà des buzz, je pense que c’est ça qui marche. Moi, je viens de nulle part, je n’étais pas du tout prédestiné à avoir cette vie que j’ai maintenant à Paris et à faire ce métier. Donc tout est possible, il faut vraiment travailler, y croire et être soi-même.