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Musique

Love letter à Harry Styles

L’ancien des 1D vient de dévoiler Harry’s House…et ça m’a mis dans tous mes états. Retour sur ma fandom.

Inutile de présenter Harry Styles. Et si tu étais jusqu’alors passé.e à côté du phénomène, tu n’as pas pu échapper à son dernier titre, “As It Was”. Rythme addictif et succès fulgurant : c’est en grande pompe que le chanteur a annoncé la sortie de son troisième album solo. Moi, je suis une journaliste et critique littéraire tendance intello et féministe. Et avant même sa sortie, Harry’s House m’a mise dans tous mes états. Tout ce que fait Harry Styles me met dans tous mes états. Parce que j’aime tout chez Harry Styles.

Je vais pas te la faire à l’envers, j’assume : oui, bien sûr que j’aime ses yeux verts, les fossettes profondes que creusent ses sourires et son corps sculptural. La bienséance me retient d’en dire plus, mais je pense vraiment très souvent à ce corps. Mais j’aime aussi ses chansons, la qualité littéraire de ses textes – eh oui ! –, l’efficacité de sa musique. Et sa voix rauque. J’aime la façon dont il a, en quelques mois, mis le monde de la mode à ses pieds en osant les tenues les plus excentriques – parfois pour le pire ! – et en se faisant photographier en robe. J’aime découvrir, à chacun de ses concerts, une nouvelle audace vestimentaire. J’aime aussi le voir sur scène parce que je trouve que c’est un performeur hors norme. J’aime ce qu’il fait de son image, et la stratégie de communication qui s’est mise en place autour de lui ; il donne peu d’interviews, reste très secret concernant sa vie personnelle : il mise sur la rareté pour se rendre désirable. J’aime qu’il ait toujours refusé de répondre aux questions concernant son orientation sexuelle, le soutien qu’il affiche aux communautés LGBTQ+ et aux femmes. 

 

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L’intellectuelle et la groupie

J’ai étudié la philosophie jusqu’au doctorat, j’aime les essais féministes pointus et la littérature exigeante. Avec application, je me suis construit une image d’intellectuelle minutieuse et engagée. Mais je me suis aussi toujours bercée de pop folk britannique. J’ai passé des journées à la bibliothèque, j’ai lu Platon et Hegel dans le texte, puis Michel Foucault et Judith Butler, et je suis rentrée chez moi écouter en boucle les chansons des One Direction. J’ai écouté sans relâche, alors que je chroniquais pour la presse les textes d’auteurs et d’autrices les plus prestigieux.ses, la voix profonde d’Ed Sheeran me chantonner ses airs romantiques. Et aucun livre ne m’a jamais autant émue que Thinking Out Loud, aucun livre ne m’a plus réconfortée que Shape of You. C’est comme ça. 

Mon engagement féministe, aussi politique qu’intime, me pousse à lire et à chroniquer en priorité les textes de femmes. Pourtant, quand il est question de musique, je n’écoute presque que des hommes. Ni la superbe voix d’Adele ni ses textes travaillés ne me procurent les mêmes émotions qu’un Ed Sheeran, qu’un George Ezra ou qu’un Harry Styles. Ai-je précisé que j’étais hétéro ? J’ai longtemps vécu ces amours dans le secret le plus strict. Mon identité de journaliste féministe intello me semblait difficilement conciliable avec la fan de pop masculine qui sommeillait en moi. Mes goûts musicaux m’apparaissaient illégitimes et futiles, puisqu’ils reposaient aussi sur des attractions érotiques. 

Je m’infligeais en réalité un double préjugé, à la fois classiste et sexiste. Pourquoi l’exigence intellectuelle par laquelle je me définis devrait-elle exclure la culture populaire ? Pourquoi, parce que je suis capable de lire et de décrypter les textes les plus ardus, devrais-je m’emmerder à écouter de la musique classique quand je rentre chez moi ? Une fois les préjugés classistes déconstruits, j’ai pu librement revendiquer mon immense admiration pour Taylor Swift et Miley Cyrus. C’était déjà ça, mais la féministe en moi continuait de se sentir coupable de son amour pour Harry Styles. Étais-je la femme indépendante et déconstruite que je voulais être si j’étais éperdument amoureuse d’un chanteur de boys band à la voix grave et à l’irréprochable plastique ?

Je ne voulais surtout pas être une “groupie ni même une fan, d’ailleurs. J’aurais trouvé décrédibilisant, voire humiliant, d’être qualifiée ainsi. Dans l’imaginaire collectif, une groupie, c’est d’abord une jeune femme, et je me sens déjà trop vieille pour y correspondre. C’est d’ailleurs ce qui suffit à faire des groupies un groupe socialement disqualifié : ce qu’aiment majoritairement les jeunes femmes est aussitôt marqué d’une suspicion sexiste. Une groupie, donc, c’est une jeune femme qui aime un chanteur ou un groupe – et qui l’aime vraiment très fort. Elle se renseigne, elle connaît les chansons par cœur, elle élabore des théories interprétatives, elle écrit des fanfictions, elle réalise des montages ou des vidéos, elle attend des heures devant les salles de concert, elle hurle son désir et sa joie. C’est une “fan hardcore”. 

Et une groupie s’expose aux jugements les plus sévères : elle est folle, “hystérique”, obsédée, n’a rien de mieux à faire. Mais la groupie ne se décrédibilise pas seulement elle-même. Elle est une figure suffisamment dévaluée de la pop culture pour que l’opprobre touche aussi l’objet de son amour. C’est pourquoi les boys bands peinent à être pris au sérieux – en dépit de leur succès parfois durable, de la qualité de leurs productions et des chiffres mirobolants de leurs ventes. Pourquoi les propriétaires – masculins – de la culture légitime s’intéresseraient-ils aux One Direction ou à BTS, dont les fan bases se composent en majorité de jeunes femmes ? Les goûts de ces dernières méritent-ils vraiment d’être pris au sérieux ? Faut-il rappeler qui étaient les fans de la première heure d’un groupe comme les Beatles ? 

Harry’s House m’a extraite de mon quotidien, m’a émue aux larmes, m’a fait frémir de désir, m’a absorbée tout entière. Et je ne vois aucune bonne raison de me blâmer de cette intensité

Harry’s House : le triomphe du chanteur à groupies

À l’image de celles qui se réapproprient les termes insultants tels que “salope” ou “connasse” pour les défaire de leur charge péjorative, je prends maintenant plaisir à me définir comme une “groupie”. C’est la petite transgression que je m’autorise, dans ma vie somme toute bien rangée. 

Et je crois qu’Harry’s House est l’occasion que j’attendais pour réhabiliter l’objet de mes fantasmes. Je comprends bien que ce soit contrariant, mais cet album est la preuve qu’Harry Styles n’est pas seulement sculpté comme un dieu grec : il est aussi un artiste particulièrement talentueux.

J’ai eu la chance de découvrir avant tout le monde ce nouvel album – est-ce que je profite de mon statut de journaliste culture pour assouvir mes penchants de fan ? Oui. Mais c’est très angoissant, tu le sais peut-être, de découvrir la dernière sortie d’un artiste qu’on aime si profondément : c’est, après tout, courir le risque d’être déçue. 

Je suis fébrile, donc, alors que je lance le premier titre de l’album, “Music for a Sushi Restaurant”. Il s’inscrit dans la continuité de “Treat People With Kindness”, qui achevait le dernier projet d’Harry Styles, Fine Line. C’est une chanson légère et joyeuse, un titre qui s’amuse. Je suis déjà toute retournée d’entendre enfin mon chanteur sur des airs que je n’ai pas encore écoutés des dizaines de fois, mais ce n’est pas le style que je préfère chez Harry. Mon rythme cardiaque s’accélère – et si je n’aimais pas Harry’s House ? Dès les titres suivants, je me rassure. “Late Night Talking” et “Grapejuice” sont des chansons d’amour comme je les aime, tendres, sensuelles et enjouées. Je connais déjà l’addictive “As It Was”, mais je m’en délecte à nouveau, avant que “Daylight”, plus nostalgique, ne débute. Et je n’ai pas le temps de m’en remettre qu’Harry entonne déjà les premiers mots de “Little Freak”. Le titre est superbe, d’une infinie délicatesse, son texte est subtil et la voix d’Harry me semble plus maîtrisée et plus profonde que jamais. Je sais déjà que “Little Freak” est ma préférée ; la meilleure chanson d’Harry’s House, et peut-être de toute la discographie du chanteur. Alors que “Matilda” achève de m’émouvoir, je me demande combien de mois je vais passer à faire résonner cet album en boucle. 

 

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Plus proches de la pop que du folk, plus entraînantes et plus sexy, “Cinema” et “Daydreaming” flirtent – dangereusement – avec l’érotisme. Je me retiens de hurler, alors qu’Harry joue avec mes nerfs fragiles de groupie, et (me) demande “give me something to dream about” (“Donne-moi matière à rêver”). En homme moderne et déconstruit, il ne chante jamais la sexualité sans oublier d’évoquer le plaisir de sa.son partenaire : “You pop when we get intimate” (“Tu éclates quand on se rapproche”). Je ne vais pas m’en remettre. 

La profondeur et la nostalgie reviennent pour les derniers titres, qui évoquent les doutes amoureux (“Keep Driving”), les ruptures (“Satellite”) et l’amour qui leur survit (“Love of My Life”). Juste avant ce dernier titre, objectivement déchirant, Harry a glissé “Boyfriends” – dans lequel il semble me faire un clin d’œil féministe, alors qu’il évoque les comportements toxiques ou décevants dont les hommes se rendent souvent coupables dans leurs relations amoureuses.

Harry’s House m’a extraite de mon quotidien, m’a émue aux larmes, m’a fait frémir de désir, m’a absorbée tout entière. Et je ne vois aucune bonne raison de me blâmer de cette intensité. Je ne vois aucune bonne raison non plus de ne pas m’accorder encore quelques minutes, pour me rêver loin de ma vie, à parcourir le monde au rythme de la tournée de mon chanteur préféré, à le voir jouer tous les soirs, et à hurler ma reconnaissance.

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